En Égypte, le système judiciaire reste basé sur les principes islamiques, puisqu’il reprend en grande partie le qānun ottoman (code de loi qui avait pour but de codifier la charia). Au cours du XIXe siècle, l’exécution des peines hudud se fait moins fréquente, mais les législateurs ne rejettent pas la base qu’est la loi islamique[8].
Des tribunaux appliquant les principes de la charia existaient
d’ailleurs toujours aux côtés des nouveaux. Ce qui sera le cas non
seulement en Égypte, mais dans la quasi-totalité du monde musulman.
(...)
Aujourd’hui, une doctrine quasi-constitutionnelle vis-à-vis de la
charia a émergé, à la fois parmi les juristes ou parmi les islamistes[8].
En effet, les juristes ont commencé à avoir une approche plus positive
de la charia à partir des années 1930, en faisant remarquer que les
codes de lois des pays musulmans devaient se fonder sur des sources
indigènes plutôt que sur des sources de lois européennes[11].
De leur côté, les islamistes, confortés par le changement de sens du
terme charia et sa plus grande codification, ont insisté sur le fait
que la charia devait avoir une forme codifiée, et ils positionnent la
charia comme étant supérieure à tous les autres codes de lois
(constitution, législation normale et règlements administratifs)[12]. L’exemple d’une constitution basée sur la charia est d’ailleurs celui de l’Iran depuis la révolution de 1979.
La nouvelle signification de la charia en tant que code de lois est
donc devenue beaucoup plus difficile à circonscrire, et les
gouvernements de nombreux pays musulmans (comme l’Égypte) se sont
engagés à vérifier leur codes légaux afin de s’assurer qu’ils sont en
conformité avec la charia[8].
La redéfinition de la charia a permis de donner un pouvoir politique
plus grand à celle-ci, mais, en revanche, le pouvoir de la loi
islamique est en même temps restreint à des sujets plus spécifiques.
Nathan Brown dit que si la charia était mise en place complètement dans
certaines sociétés, cela nécessiterait des changements très importants
dans la loi commerciale et les codes pénaux. À l’heure actuelle, la
mise en place de la charia n’est pas complète, mais elle est fortement
présente dans la vie politique des pays musulmans[8].