Bonjour,
Je suis assez consternée par cette affaire de vidéo. D’abord, Tristan, le problème n’est pas dans une justification sur la question de savoir si le monde, la société, le peuple ou je ne sais quelle entité abstraite est juste ou pas avec les profs. Cette façon nombriliste de poser la question du rôle des enseignants est vraiment irritante.
Le premier problème posé par cette vidéo est de savoir si le PS est un parti politique qui s’occupe de l’intérêt général ou s’il est la vitrine politique du corporatisme des fonctionnaires, et particulièrement des enseignants. Cette vidéo, diffusée dans les circonstances que l’on sait, pose d’abord cette question-là. D’autant que, à l’évidence, cette affaire ne peut que nuire à SR pour son investiture et ne pourra que lui profiter dès le lendemain !
Un peu plus au fond, l’article tourne autour d’un sujet qui fait problème : comment les enseignants rendent compte ? La règle générale, c’est 35 heures dans un atelier ou dans un bureau, dans une entreprise ou dans une administration. C’est aussi une production, ou un service rendu avec des résultats mesurés. Et là, il y a un malaise parce que l’absence de compte-rendu devient plus voyante à mesure que le prestige social des enseignants baisse.
Pour parler de ce que je connais le plus précisément, pour être amenée à travailler régulièrement avec des directeurs d’écoles primaires et maternelles, j’ai directement sous les yeux le lent recul social des enseignants. Et par rapport aux territoriaux, c’est flagrant : entre l’emploi de directeur d’école et celui de secrétaire de mairie, quel était l’emploi le plus qualifié il y a 30 ans ? et aujourd’hui ? J’ai maintenant un chef de service municipal enfance et scolarité dans mon équipe, et en face des enseignants qui ont parfois bien du mal à admettre les règles élémentaires de la collaboration alors qu’ils sont en permanence en position de mendiant parce que l’EN n’assume aucune responsabilité logistique.
Il y a en arrière-plan tout un débat sur l’autonomie et la décentralisation des différents niveaux d’établissements scolaires. L’observation sur l’absence de bureaux dans les écoles est tout à fait exact, mais nulle ailleurs en Europe on ne persiste non plus comme en France à mettre deux patrons sous le même toit (EN + collectivité locale). Je pense que l’un des points de blocage non-dits de la décentralisation tient aux positions statutaires des enseignants et des territoriaux. Parce que tout de même les directeurs d’école de ma commune sont mieux payés que moi, et que, sur le plan de la comparaison du temps de travail et de la qualification, il y a de quoi s’en amuser un peu.
Le contribuable est en général plus informé sur les catégories sociales qui achètent les camping-car que sur la mesure de l’efficacité des établissements scolaires qu’il paie. Et cela finit par poser problème.