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Commentaire de armand

sur Il y a 1.000 ans, le Saint-Sépulcre était détruit par le calife Hakim


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armand armand 19 octobre 2009 17:58

Si je puis me permettre, s’agissant de l’Islam indien, quelques rectiicatifs s’imposent :

Les razzias destructrices de Mahmoud de Ghazni, pour terribles qu’elles fussent, n’étaient que cela... des razzias, des destructions, des pillages, mais aucune conquête à proprement parler.
Mahmoud, si terrible pour l’Inde hindoue, était en revanche un mécène pour la culture persane, commandant à Ferdousi le célèbre Shahnameh (tout en payant chichement le poète, qui s’en alla distribuer les quelques poignées de pièces d’argent dans les hammams de Nishapour.) Il est resté célèbre pour avoir été amoureux fou de son bel esclave, Ayaz...

Ce sont les Turcs Qutb ud-Din Aybak et Shams ud-Din Iltutmish qui fondèrent cent ans plus tard le sultanat de Delhi qu’ils conquirent sur les Rajpoutes. Ils détruisirent de nombreux temps dont ils réutilisèrent les matériaux pour construire la mosquée Quwwat ul-Islam et le plus haut minaret de tous les temps, le Qutub Minar.
Ces sultans étaient d’origine et de culture turco-afghans - très vite ils comprirent qu’ils devaient faire une entorse aux exigences islamiques et traiter les 80 pour cent de sujet hindous comme des ’gens du livre’ s’ils voulaient gérer un état viable. Il faut les distinguer des Mongols. Mieux encore, c’est Ala ud’Din Khaliji qui protéga le sous-continent contre les armées de Genghis Khan.
L’un des ses succeseurs (génie ou fou furieux selon les chroniqueurs) Muhammad bin Tughlaq tenta de transférer la capitale à Déogir dans le Deccan - il se heurta au conservatisme profond du pays et dut abandonner. De même, il institua une monnaie de cuivre fiduciaire à la place des espèces en or et en argent. Aussitôt, nous dit un historien « la maison de chaque Hindou devint un atelier de faussaire ». Le sultan, beau joueur, reprit toutes les pièces à leur valeur faciale et frappa des monnaies d’or avec l’inscription coranique « Dieu et riche et vous, vous êtes les pauvres »... De l’humour ?
L’effritement du sultanat en plusieurs petites royaumes permit à Tamerlan de saccager le pays vers 1400.
En revanche, chez certains sultanats-successeurs, il y eut effectivement des synthèses entre l’Islam et l’Hindouisme - en particulier dans le Malwa, où l’on chante encore les amours du sultan Baz Bahadur et de la poétesse hindoue (et probable courtisane) Rupamati, la « Dame au Lotus », pour qui il construisit un palais qui se visite encore à Mandou.
Il y eut aussi, à Jaunpur, un brillant sultanat dirigé par une dynastie d’origine africaine (des anciens esclaves du sultan de Delhi).

Il faut attendre les Grands Moghols pour qu’il y ait véritable coexistence égale entre les deux religions, sous le règne d’Akbar, au XVIe siècle. C’est lui qui accomplit l’acte symbolique de supprimer la taxe spéciale qui frappait les dhimmis.

Le problème c’est qu’ont alterné - et même côtoyé - phases répressives, « islamistes » si on veut - et phases de grande tolérance. On a le bigot Aurangzeb, mais aussi son frère Dara SHokuh, tous deux fils de Shah Djahan, qui traduisit en persan les livres saints des Hindous, les faisant connaître ainsi en Europe.
Quant aux conversions, beaucoup étaient dues à un fait capital - adopter l’Islam c’était échapper au système des castes... Enfin, pas toujours, car l’Islam indien a imité l’Hindouisme, érigeant les (prétendus) descendants du Prophète, les Sayyids, à la place des Brahmanes ; les nobles turco-iraniens à la place des Tchatriyas, et laissant les convertis... à la place des Shudras...
Il n’empêche, dans l’ensemble l’Empire mogol fut accepté comme légitime, comme ’indien’ même par les Hindous.

Bien entendu, avec l’introduction du nationalisme à l’occidentale cette coexistence à volé en éclats - les nationalistes hindous voulant se venger des conquêtes islamiques tandis que les musulmans, se sentant menacés par la majorité, ont souscrit au projet du Pakistan. Et n’oublions pas que le Pakistan était prévu comme foyer national d’un ’peuple musulman indien ’ (à ne pas confondre avec le pan-islamisme), inspiré du très-laïc Atatürk par l’athée Ali Djinnah.
Ce sont les généraux wahhabites style Zia ul-Haqq qui ont dénaturé le projet.


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