Bonjour Péripate. Excellente question d’ordre logique à laquelle j’espère l’auteur répondra.
J’ai pour ma part une autre remarque à faire. Le Coran est présenté dans cet article sous son aspect incréé, révélé du temps de Mahomet. Or cette version catéchisante, si je puis dire, est mise en cause par tous les islamologues. Très léger, donc, ce texte.
Le Coran, avant d’être un livre, a été un ensemble de messages transmis
de Muhammad. Ils sont reçus par les musulmans comme Parole de Dieu.
Mais comment sont-ils devenus un livre ? À cette question, une réponse
simple est couramment donnée aujourd’hui : sous le calife ‘Uthmân
(644-656), un livre a été constitué rassemblant tous ces messages, et
ayant acquis le statut de Révélation.
Pourtant, les historiographes musulmans des premiers siècles suggèrent
que la rédaction du texte coranique connut une histoire bien plus
complexe, qui ne s’acheva qu’au Xe siècle avec la fixation d’un corpus
intangible et commun à tous les musulmans. Cette mise en écrit des
textes transmis a impliqué des choix dans un contexte de divisions
politiques et de confrontations religieuses, elle a nécessité
l’intervention des autorités califales, elle a entraîné des débats sur
le statut du Prophète, sur l’origine, la langue, la nature de son
message.
A.-L. de Prémare, historien des textes et des idées, reprend ces
questionnements d’hier, en traitant des origines du Coran selon les
méthodes et les interrogations propres à toute recherche actuelle sur
la littérature religieuse.
Connaître ainsi les modalités de rédaction du corpus coranique,
analyser les procédés littéraires alors mis en œuvre, découvrir les
enjeux politiques et religieux sous-jacents permettra de mieux
comprendre un livre dont l’opacité première est due, entre autres, aux
conditions de sa production et pas seulement à son statut de parole
révélée. La voie est alors ouverte pour sortir du cadre d’une exégèse
traditionnelle, de type historico-théologique, et envisager des
lectures critiques renouvelées de cette « Écriture sainte »