Il est si vrai que la Propriété est antérieure à la loi,
qu’elle est reconnue même parmi les sauvages qui n’ont pas de lois,
ou du moins de lois écrites.
Quand un sauvage a consacré son travail à se construire une hutte,
personne ne lui en dispute la possession ou la Propriété.
Sans doute un autre sauvage plus vigoureux peut l’en chasser,
mais ce n’est pas sans indigner et alarmer la tribu tout entière.
C’est même cet abus de la force qui donne naissance
à l’association à la convention, à la loi,
qui met la force publique au service de la Propriété.
Donc la Loi naît de la Propriété,
bien loin que la Propriété naisse de la Loi.
Le silence soviétoïde de l’Université n’a pas réussi tout à fait à empêcher la voix de Bastiat de parvenir jusqu’à nous. 
Dans ce texte sur la propriété, il est très critique sur le droit romain (comme il est très critique sur l’enseignement du latin, accusé par lui de transporter en douce des valeurs étatiques et guerrières).
Les Romains devaient considérer la Propriété
comme un fait purement conventionnel,
comme un produit,
comme une création artificielle de la Loi écrite... Comment eux, qui vivaient de rapine,
dont toutes les propriétés étaient le fruit de la spoliation,
qui avaient fondé leurs moyens d’existence sur le labeur des esclaves,
comment auraient-ils pu, sans ébranler les fondements de leur société,
introduire dans la législation cette pensée
que le vrai titre de la propriété, c’est le travail qui l’a produite ?
Non, ils ne pouvaient ni le dire, ni le penser.
Ils devaient avoir recours à cette définition empirique de la propriété,
jus utendi et abutendi,
définition qui n’a de relation qu’avec les effets,
et non avec les causes, non avec les origines ;
car les origines, ils étaient bien forcés de les tenir dans l’ombre.
D’autant que l’école de Salamanque me semble un très bon précurseur de ce droit.
C’était la seule petite critique sur un texte par ailleurs jubilatoire... 