Article complètement dans le faux.
Loin de moi l’idée de défendre Peillon qui n’est pas un homme politique que j’apprécie vraiment bien au contraire, ni de cautionner sa façon de faire qui est évidemment criticable, mais je ne peux que lui pardonner quand il en fait une tentative réussie de lancer un tout autre débat, celui de la liberté d’expression et de la main mise de l’elysee sur les médias de masse comme maintenant France 2.
C’est vrai chacun a le droit de lancer le débat qu’il veut, de discuter de ce qu’il veut, d’exprimer ce qu’il veut, c’est la liberté d’expression en effet.
Seulement s’arrêter à cela en ce qui concerne la soirée de France 2 est une grave erreur, le problème dépasse évidemment cette simple considération.
Les chaines de télévision sont ce qu’on appelle un média de masse. Les médias de masse il n’en existe pas une infinité.
Et le champ d’expression dans chaque média de masse est lui même limité.
A la radio et à la télévision, c’est le temps d’antenne qui crée cette limite.
Dans les journaux papiers, c’est la place qui crée cette limite.
Parce que le champ d’expression dans les médias de masse est limité, contrôler l’expression dans ces médias de masse devient un pouvoir, pouvoir qu’on appelle généralement le pouvoir médiatique.
Il est évident que si une personne s’exprimme à France 2 en prime time, elle sera entendue par des millions de personnes, tandis que si une personne s’exprime dans une radio locale elle ne sera entendue que par seulement quelques disaines de personnes, l’impact est évidemment différent.
Voilà pourquoi ce pouvoir doit être réglementé, c’est normalement le rôle d’un organisme comme le CSA qui doit s’assurer que toutes les expressions possèdent un temps d’expression équitable et qu’aucune expression n’est lésée.
En pratique, même si le CSA tente tant bien que mal de remplir ce rôle, on est très loin de cet idéal, si bien que certaines personnes, certains courants d’idées bénéficient généralement d’un temps d’expression abusivement volumineux, tandis que d’autres personnes, d’autres idées ne possèdent pas dutout ou très peu de temps d’expression dans ces médias de masse.
Et ceci est le résultat direct du fait qu’une petite oligarchie de journalistes ou de responsables des chaines de télévision contrôle totalement l’accès à ces chaines de télévision.
Si Alain Duhamel, Jean Michel Apathie, réagissent avec autant de violence au fait que Vincent Peillon attaque Arlette Chabot, ce n’est pas par amitié pour Arlette Chabot, ni par corporatisme vu que des tas d’autres journalistes n’en ont strictement rien à faire du sort d’arlette chabot, ils réagissent comme cela parce que Vincent Peillon s’attaque à l’une de ceux qui justement contrôlent ce pouvoir médiatique. Quand Vincent Peillon s’attaque à Arlette Chabot, ce n’est pas juste à une journaliste ou à une responsable d’une chaine de télévision qu’il s’attaque, c’est à toute l’oligarchie qui contrôle ce pouvoir médiatique qu’il s’attaque, c’est leur petit pouvoir qu’ils se partagent tous entre eux tacitement et qu’ils gardent jalousement qu’il menace.
Les choses ainsi posées il faut revenir sur l’emission en elle même.
Ce que dénonce Vincent Peillon, à juste titre, et bien tard je trouve ( d’autres le dénoncent depuis des semaines ) c’est la collusion qui existe entre Arlette Chabot et Nicolas Sarkozy.
Il y quelque mois, la gauche dénonçait la réforme sur l’audio visuelle votée par le gouvernement qui octroyait à Nicolas Sarkozy un nouveau droit, celui de nommer directement les dirigeants des services publics audiovisuels. A ce moment là nous défendions la nécessité de garder une indépendance stricte entre les médias et le pouvoir exécutif, nous dénoncions le risque que ces médias soient utilisés à des fins de propagande, le risque que la liberté d’expression soit baffouée, que l’équité d’expression ne soit pas respectée et justement ce que Vincent Peillon met en évidence ici c’est exactement ce que nous craignions et ce que nous dénoncions.
Tout le monde le sait, le débat sur l’identité nationale est la volonté de Nicolas Sarkozy, tout le monde a entendu les critiques formulées contre ce débat, il a été dénoncé la volonté de Nicolas Sarkozy de vouloir remettre sur le tapis les thèmes de l’immigration et de l’insécurité en vue des prochaines élections régionales, bref à des fins électoralistes. L’opposition dans son ensemble ne voulait pas de ce débat.
Et d’ailleurs les français ont confirmé que ce n’était pas dutout leur préocupation du moment.
En mettant en prime time sur la chaine du service public une émission mettant en scène Eric Besson et Marine Lepen, Arlette Chabot sert clairement la soupe à Nicolas Sarkozy au mépris de toute l’opposition, à un tel mépris que pour elle l’opposition se résume à Vincent Peillon, qui n’est pourtant ni le porte parole de l’opposition, ni le porte parole de la gauche, ni même le porte parole du PS, drôle de conception de l’opposition n’est ce pas ?
Vincent Peillon a raison de dénoncer qu’il allait servir uniquement de caution d’opposition. Le véritable but de l’émission était clairement le duel Lepen/Besson, c’est à dire le duel extreme droite / droite extreme, vive le pluralisme.
Il n’est donc pas difficile de faire le lien entre le nouveau pouvoir du président et le choix de France Télévision en matière de débat télévisé et d’invité.
Cette main mise du président s’aggrave encore plus quand on s’apperçoit que la prochaine grande émission politique mettra en scène Nicolas Sarkozy lui même, pour 3 heures de « pédagogie » auprès des français, interviewé par 2 journalistes totalement complaisants à son égard, Laurence Ferrari et Jean Pierre Pernault, sur une chaine de télévision TF1 qui a déjà largement prouvé pour qui elle roulait.
Alors non, il ne faut vraiment pas s’arrêter aux considérations simplistes de l’auteur de cet article. Il faut au contraire comprendre qu’ici Vincent Peillon soulève le vrai débat. Il n’y a pas de démocratie sans liberté d’expression et sans équité en matière d’expression dans les médias de masse, il n’y a pas de démocratie si ces médias de masse servent d’outil de propagande pour le gouvernement, il n’y a pas de démocratie si les médias ne sont pas indépendants du gouvernement. Et ce qu’à fait Vincent Peillon est justement l’occasion de soulever toutes ces questions, parce que c’est sans doute 1000000000 fois plus important que cette connerie de débat sur l’identité nationale.
A quand une émission sur l’oligarchie médiatique corrompue et aservie au pouvoir présidentiel à 20 h 30 ? Bien sur jamais ...