Comme il devient usant de combattre les extrêmes sur ce site par des arguments ou par joutes oratoires, j’avais proposé un article à Agoravox qui a été reporté plusieurs fois puis refusé comme c’est le droit du comité de lecture. J’espère qu’il fera oeuvre utile ici.
- Avant-propos :
L’article qui suit a été refusé par le comité de rédaction. Je le reproduis ici car il dénonce le danger Le Pen et le risque des clonages « softs » de la sondocratie. C’est un texte lyrique donc plus une image qu’une argumentation étayée.
Même si le style peut le laisser croire, ce n’est pas un appel à la révolution mais un texte lyrique servant la cause du Citoyen qui doit se ressaisir en retournant aux urnes et en ne se laissant pas imposer des comportements de vote (vote pour les têtes de sondages, votes dits « utiles », votes extrêmes...).
- L’article : « Peuple, reprends tes droits ! »
Jamais dans leur histoire, les Français n’auront mérité autant l’expression que le Général De Gaulle leur réserva : « Les Français sont des veaux ! ». Notre pays, qui a mené plusieurs révolutions, exporté les Droits de l’Homme, combattu de rudes épreuves, abrite aujourd’hui un peuple de moutons. Tandis qu’en Amérique latine, des peuples élisent des présidents dotés d’une volonté forte de changement, que des peuples européens forment des gouvernements d’union nationale pour dépasser les clivages partisans, souvent stériles, et engager des réformes consensuelles et durables. Ailleurs encore le peuple a recours à des référendums populaires. Mais en France, le peuple a réduit son choix à deux voies étroites : la gérontocratie (Le Pen, Chirac), la « sondocratie » (Sarkozy, Royal).
« Les Français sont des veaux. » (Charles De Gaulle)
L’amiral Philippe de Gaulle, dans son ouvrage « De Gaulle, mon père, Entretiens avec Michel Tauriac », (2 tomes, Plon, Paris 2003 et 2004), s’explique sur l’usage que faisait son père de cette expression à propos des Français : « Il l’a souvent employée quand il les voyait ne pas réagir ou se considérer comme battus avant même d’avoir engagé le fer. » Au début de juin 1940, alors qu’il vient de stigmatiser l’armistice à la BBC, il souffle à l’oreille de son fils : « Ce sont des veaux. Ils sont bons pour le massacre. Ils n’ont que ce qu’ils méritent. » Quand le Général parlait de « La France vacharde. », il la comparait à un bovidé rétif cherchant à donner le coup de corne ou de pied à ceux qui veulent la faire avancer. Une autre expression lui était familière : « Les Français s’avachardisent. », termes militaires pour signifier qu’ils s’avachissent en grognant. Plus optimiste, dans une lettre au père Bruckberger, le 27 mai 1953, il écrivait : « La mollesse française est d’une extrême épaisseur. Mais même en France, elle n’a pas l’Avenir, qui est aux forts. » Ce qui entrouvre l’espoir d’un avenir possible si les forts se mobilisent. Par « forts », on peut entendre le peuple des citoyens...
La guerre des vieux :
La guerre des vieux en marche ? C’est beaucoup dire. Il va falloir plutôt penser à sortir les canes et les béquilles. Pour une partie d’entre eux, les Français d’aujourd’hui, apeurés par l’évolution en marche -la mondialisation, les mutations économiques et technologiques, la construction européenne, le brassage ethnique-, se rangent derrière un leader charismatique qui tranquillement moissonne les intentions de votes de nombreux désabusés de la molle démocratie représentative qu’incarne l’UMPS (contraction de UMP et PS). A quoi ce vote que l’on dit de défiance et d’avertissement aura-t-il servi en 2002 ? A faire élire un autre vieux chef, lequel crédité seulement de 19 % de voix au premier tour des Présidentielles, fut plébiscité par 82 % des votants au second tour. L’UMP, sortie toute puissante des urnes, put ainsi gouverner en privilégiant ces 19% d’électeurs. Un vieux en a chassé un autre. Le vieux en fonctions jusqu’à 2007 se montre en décalage complet avec la jeunesse, comme on a pu le voir au moment de la crise des banlieues en 2005. L’homme de comprend plus rien à la réalité sociale d’aujourd’hui. L’autre vieux n’est guère plus en phase avec ses concepts d’un autre âge. Et pourtant en 2007, on remet ça ! Le parti d’Extrême-Droite prenant du poil de la bête et ladite bête se faisant de plus en plus menaçante, une fois encore le vieux chef républicain devra faire barrage de sa personne, reprenant le credo de son illustre ancêtre Charles De Gaulle, en résumé « Moi ou le chaos ». Une fois de plus, les électeurs frontistes en seront pour leurs frais et renvoyés dans les cordes au second tour. Mais la gérontocratie en aura pris cinq ans de plus !
La guerre des images :
Pour la raison hypocritement avancée d’épargner au pays la survenue du plus effroyable -la désaffection des isoloirs ou l’élection d’un Jean-Marie Le Pire-, Nicolas Sarkozy puis Ségolène Royal se sont livrés -bien avant la date de début de campagne fixée par la constitution- à un duel médiatique omniprésent, envahissant même, prétendant rassembler sur leurs noms le plus gens possibles et mobiliser les abstentionnistes qui pourraient laisser passer la bête encore une fois. Et tant pis si, pour cela, il faut racoler sur des thèmes où ils ne font que pâle figure face à celui qui, rompu depuis trente ans à l’exercice de tribun du peuple et de ses mécontentements, se montre imbattable sur ce terrain-là.
Tous les coups et tous les moyens sont permis dans cette lutte par presse people interposée, ou presse se faisant people pour l’occasion. Chacun des deux candidats ne quitte plus des yeux l’évolution des courbes de sondages et échafaude un programme à fluctuations variables exactement calquées sur les courbes desdits sondages. Des débats démocratique ? Pour quoi faire ? Je suis la reine des sondages, je m’imposerai. Je suis le roi du parti (ou du parti-très-vite ?) : Je serai président !
Fini la guerre, on veut la paix !
Ainsi sommé de faire son choix entre deux systèmes de démocratie : la gérontocratie et la sondocratie, le peuple français balance à droite, le peuple français balance à gauche, le peuple français perd son équilibre. Est-il trop tard pour réagir ? Je pense que non, si les Français ont un sursaut de maturité et se remettent en tête de faire revivre la démocratie, la véritable, celle qui repose sur ses citoyens. Des citoyens et non de simples électeurs, téléspectateurs, lecteurs de presse people. Pas des « veaux » : des citoyens !
« Ici on s’honore du titre de citoyen et l’on se tutoie ! » proclamait-on en 1789. Et aujourd’hui où en est-on ? Peuple, reprends tes droits !