Un article pour répondre au nartic...
Comment peut-on être capitaliste ?
Comment peut-on être capitaliste ? En réponse au Figaro de Luc Ferry
Les pseudo-philosophes de droite ont érigé leurs certitudes autour de quelques points auxquels ils s’attachent mordicus.
Dans tous leurs articles, nous retrouvons sans peine les mêmes
idioties. L’un des derniers exemples en date, à notre connaissance, est
la magnifique interrogation de notre ex-ministre de l’éducation Luc
Ferry dans le Figaro du 10 mars 2010, qui se demande bien « comment
peut-on être « maoïste ? », aujourd’hui, et qui dénonce une « sainte alliance entre vieillards séniles et jeunesse futile. »
Disons que l’argument central de Ferry, comme toujours, chez les
réactionnaires, est l’argument de la honte : « Honte à vous, les gens
du communisme, qui soutenez une idéologie qui fit « cent vingt millions
de morts ». Mais, mon dieu, quelle lassitude, Messieurs, que d’endurer
votre essentielle et perpétuelle comptabilité macabre, votre livre noir
du communisme, comme s’il s’agissait là d’une massue idéale et parfaite
à l’égard des deux questions que vous voulez, en réalité, occulter, celle de l’absence de justice présente. Et celle de la valeur éternelle de l’hypothèse de la communauté, de l’Idée même du communisme.
Il est sûr que votre idéologie de charognards, à moitié
inconsciente, votre capitalisme, est d’enfance innocente et d’haleine
au menthol : que faites-vous donc, lorsque vous établissez vos comptes
mortifères, au Figaro, des 3 millions de victimes de l’agent orange et
du napalm vietnamiens ? Et, puisque vous voulez donner des leçons
expéditives d’Histoire, de l’originaire traite des Noirs, de
l’extermination des Indiens d’Amérique, de la colonisation, des causes
éminemment capitalistes de la première guerre mondiale (et, donc, en
conséquence, de la deuxième) ? De qui se moque-t-on au petit jeu de
massacre, sinon d’une mémoire plus attentive et nuancée que la vôtre ?
Il ne nous serait pas difficile, vous, les capitalistes, de vous
reconnaître champion du monde de l’anéantissement des masses à travers
l’histoire. Le nazisme n’est-il pas, finalement, de votre côté, ce Fou
même qu’il vous reste à penser sur l’échiquier de vos pas de fée
légaux, continuellement et discrètement fascistes : votre Marianne ne
tient-elle pas d’une certaine Marine, en ces temps faisandé de
sarkozysme, bien que vous dénonciez avec hypocrisie l’autonomie et la
radicalité avouée de la Bête lepeniste - cette Belle qui, finalement,
vous sied ?
Je sais bien, cher Luc Ferry, que vous aimeriez que les
« hirondelles de la mort » soient d’un unique côté, le nôtre. Ce serait
tellement plus simple, pour les escadrons actuels et silencieux,
systématiques, de votre barbarie par indifférence, ces 9 millions de
morts de faim et de maladie dans le monde chaque année. Et pour cette mort symbolique
que le système administre quotidiennement, dans les pays riches,
eux-mêmes, aux sujets, à ce qui s’appelle réellement un Sujet, au sens
le plus philosophique du terme – un Sujet, disons-nous, pas un
spectateur, un producteur, un consommateur... Mais savez-vous ce que
c’est, cette seule chose en nous qui fait que la vie ait un sens, et
qui n’est pas réductible à la saveur d’une boîte de Coca-Cola et au
temps de cerveau disponible pour le désir de consommer ? Cela
s’appelle, ce sens, un Sujet. Un sujet vraiment collectif.
Votre courte pensée fonctionnera tant que nous éviterons de penser.
Seulement, nous, nous pensons, et nous pensons justement que tout homme
peut penser.
Toujours votre même terreur en gants de velours : « Ne bougez plus,
d’ailleurs vous êtes morts, vous êtes terminés. Staline vous a tués,
vous-mêmes... » Et vous osez parler d’une mode du communisme, chez les
jeunes intellectuels... Nous nous réveillons en effet le matin en
pensant : « Tiens, et si je mettais un beau costume de marxiste,
histoire de faire punk-chic, ou de renouveler la bobo-attitude ? »
Croyez-vous donc que nous avons fait à ce point nôtre la superficialité
marchande et de marque de la consommation sans but – ce sans but qu’au
fond vous soutenez. Que vous parliez de « mode »" communiste chez les
jeunes intellectuels prouve assez que vous ne pensez déjà plus qu’à
travers de telles catégories... Vous acceptez, vous, un pur
matérialisme d’errance et d’appropriation, sans fin humaine réelle.
Mais pour qui nous prenez-vous ? Mépris de votre génération
d’intellectuels installés pour notre nouvelle génération, et qui croit
un peu vite avoir liquidé la pensée 68 qui nous vit naître. Mépris,
surtout, de la situation politique, des enjeux actuels, et de cette
saine révolte de la communauté qui sourd d’un peu partout, mais à
laquelle vous aimeriez justement rester sourds.
Ces pauvres philosophes droitiers oublient qu’ils ont, eux, oublié
le sens même de la philosophie, se tenant seulement dans la réaction
journalistique. Nous pouvons faire de même, voyez-vous ?, le procédé
étant tellement aisé. Et, bien sûr, nous serions, nous, les crétins,
les influençables, les victimes de l’opium marxiste. A moins que vous
ne soyez, vous - ce qui est plus probable - les clowns-philosophes du
pouvoir d’institution, les points zéros de la philosophie, et de la
politique authentique.
Fabien Tarby, et le collectif 1000 ripostes...
Chacun peut co-signer ce texte ici : 1000ripostes.blogspot.com