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Commentaire de BA

sur Le WoerthGate : Eric Woerth doit démissionner


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BA 17 juin 2010 16:07

Grosse semaine pour Eric Woerth. Alors qu’il porte à bout de bras la réforme des retraites, le ministre du Travail doit faire face à des révélations, publiées sur le site de Médiapart, qui pourraient s’avérer embarrassantes dans l’affaire Liliane Bettencourt.

Actionnaire à 27,5% du groupe L’Oréal, Liliane Bettencourt, 87 ans, est en conflit avec sa fille Françoise, qui estime qu’on a profité de la faiblesse de sa mère pour la dépouiller d’une partie de sa fortune. Leur procès doit se tenir du 1er au 6 juillet au tribunal de Nanterre.

 

Or, des enregistrements pirates réalisés entre mai 2009 et mai 2010 par un maître d’hôtel de Liliane Bettencourt font apparaître à plusieurs reprises les noms d’Eric et Florence Woerth. Lui était alors ministre du Budget et trésorier de l’UMP, tandis que sa femme travaillait pour Clymène, une société chargée de gérer le patrimoine de la milliardaire.

Le 23 avril 2010, selon un compte-rendu des enregistrements rendus publics par Mediapart, Patrice de Maistre, l’un des principaux conseillers de Liliane Bettencourt, regrette le recrutement de Florence Woerth, alors que se profile le procès avec sa fille : « Je me suis trompé quand je l’ai engagée. (...) J’avoue que quand je l’ai fait, son mari était ministre des finances (du budget, NDLR), il m’a demandé de le faire. (...) Et donc si vous voulez, aujourd’hui, sans faire de bruit, je pense qu’il faut que j’aille voir son mari et que je lui dise que avec le procès et avec Nestlé, il faut qu’on soit trop manœuvrants et on peut plus avoir sa femme. Et puis on lui, on lui, on lui donnera de l’argent et puis voilà. Parce que c’est trop dangereux. »

Interrogé par e-mail par Mediapart pour savoir si le ministre avait « imposé » sa femme chez Clymène, le service de presse d’Eric Woerth répond : « Madame Woerth mène sa propre carrière depuis le début de sa vie professionnelle. Elle est entrée chez Clymène par choix professionnel. » De même, il juge « diffamatoire et erronée » la question de savoir si Florence Woerth aurait reçu « beaucoup d’argent » de Patrice de Maistre parce qu’elle aurait pu représenter un « danger ».

 

Un autre enregistrement mentionne pourtant, à nouveau, le nom d’Eric Woerth à propos de dons d’argent. En mars 2010, Patrice de Maistre suggère à Liliane Bettencourt d’aider financièrement la majorité en lui soumettant plusieurs autorisations de paiement. « Valérie Pécresse, c’est la ministre de la Recherche. Elle fait la campagne pour être présidente de Paris. Elle va perdre, mais il faut que vous la souteniez et c’est des sommes très mineures, des petites sommes. Elle va perdre mais il faut que l’on montre votre soutien. Le deuxième, c’est le ministre du budget. Il faut aussi l’aider. Et le troisième, c’est Nicolas Sarkozy. » Avant d’ajouter : « C’est 7500 euros (le montant maximum des dons à un parti politique, NDLR), ce n’est pas très cher. Vous savez, en ce moment, il faut que l’on ait des amis. Ça, c’est Valérie Pécresse. Ça, c’est Eric Woerth, le ministre du Budget. Je pense que c’est bien, c’est pas cher et ils apprécient. »

Voilà qui va ressusciter les critiques sur le mélange des genres alors pratiqué par Eric Woerth, entre ses fonctions à Bercy et celles de grand argentier du parti présidentiel. D’autant qu’en octobre 2009, dans une autre conversation avec Liliane Bettencourt, son homme de confiance lui expliquait : « [Eric Woerth] est très sympatique et en plus, c’est lui qui s’occupe de vos impôts. C’est le ministre du Budget. Il est très sympathique, c’est un ami. »

Interrogé par RTL, ce jeudi 17 juin, Eric Woerth a indiqué « ne pas avoir touché d’argent » de Liliane Bettencourt. En revanche, les dons à des partis politiques, « c’est tout à fait possible, la loi le permet », a-t-il ajouté.

 

Plus gênant, on comprend à la lecture des compte-rendu que Patrice de Maistre déconseille à sa cliente de rapatrier en France plus de 80 millions d’euros déposés sur deux comptes bancaires suisses. A la même époque, le ministre du Budget est pourtant engagé dans une très médiatique opération de lutte contre la fraude fiscale, enjoignant les Français titulaires d’avoirs dans la Confédération de régulariser leur situation.

Le couple Woerth pouvait-il ignorer les manoeuvres de Patrice de Maistre pour mettre à l’abri les millions de Liliane Bettencourt en les expédiant à Singapour ou ailleurs ? Dans une réponse à Mediapart, le cabinet d’Eric Woerth indique que ce dernier ne s’est occupé « à aucun moment ou d’aucune façon » de ce que devait déclarer Liliane Bettencourt au fisc et « que madame Woerth n’a rien à voir, de près ou de loin, avec les procédures en cours dans l’affaire Bettencourt. Toute tentative pour l’y mêler, à quelques semaines de l’ouverture des débats d’un procès qui ne la concerne en aucun cas, relèverait d’une pure et simple manœuvre ».

 

Reste qu’après les divers déboires affectant quelques-uns de ses ministres - Rama Yade, Christian Blanc, Alain Joyandet - l’affaire Woerth tombe au plus mal pour le gouvernement. Même si, pour l’heure, l’opposition reste prudente.

Invité d’Europe 1 mercredi 16 juin, le porte-parole du PS, Benoît Hamon, a été interrogé sur ces révélations. Le fait que la femme d’Eric Woerth travaillait pour la structure qui gérait la fortune de Liliane Bettencourt constitue-t-il un problème politique ? « Ca peut le devenir, a jugé Benoît Hamon. En tout cas, c’est à lui de s’en expliquer, maintenant. »

Un député socialiste est beaucoup plus sévère : « Nous savions déjà que l’épouse d’Eric Woerth s’occupait de la gestion de la fortune de Mme Bettencourt. Et cela pose depuis le début un problème de déontologie. L’Oréal est une entreprise qui a depuis très longtemps des rapports étroits avec Bercy, que ce soit en terme de stratégie d’entreprise - sa relation avec Nestlé - ou en terme de stratégie fiscale. Dans ce contexte, la seule chose à faire pour Florence Woerth, c’était de quitter ses fonctions chez Clymène, pour ne pas prêter le flanc aux accusations de conflit d’intérêt. C’est une question de déontologie, sinon le pire arrive, et le pire, c’est le soupçon. On est en plein dedans. »

 

http://www.lexpress.fr/actualite/politique/les-liaisons-dangereuses-d-eric-woerth-et-liliane-bettencourt_900073.html


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