@ Yann Patin de Saulcour,
Merci de ces échanges courtois... et de fond sur nos stratégies, puisque notre analyse des dégâts politiques de Sarkozy est la même. Je ne fais pas de la morale (quoique je me demande si ce serait si grave que cela) ni ne m’insurge contre la vulgarité dont je n’ai rien à cirer, voire dont je me tape. Je me pose simplement des questions et exprime des inquiétudes. Je n’intellectualise pas, mais oui, je me méfie de l’appel aux « bas instincts » que Sarkozy flatte sans cesse. Je ne veux pas apaiser ni susciter de foudres, simplement échanger.
Vous dites « le voyou ainsi révélé ». Mais comment est-il possible que les gens, connaissant la trajectoire de Sarkozy et ses pratiques en tant que Ministre de l’Intérieur, aient pu avoir des illusions sur le personnage et n’avoir vu en lui qu’une personne décomplexée ? Comment expliquer que certaines personnes de gauche aient rejeté de façon haineuse Royal et aient voté contre elle, et pour ce monsieur dont nous connaissions depuis belle lurette les principes ? Les bas instincts d’un antique machisme n’auraient-ils pas joué ici ? Les gens qui ont élu Sarkozy - je n’en fais pas partie - sont responsables de l’avoir hissé là où il est. Je ne les accuse pas ni ne les excuse, je m’en désole.
Vous dites que les gens bafoués rejettent Sarkozy sans plus prendre de gants. En somme, déçus, blessés, ils agissent en écho de Sarkozy, ils font comme lui. Mais le plus grave, c’est que ce n’est pas simplement avec lui qu’ils le font, c’est entre nous que nous le faisons. La déchirure du tissu social, Sarkozy la révèle mais ce n’est pas lui seul qui l’a faite. Nous en sommes coresponsables. Et si nous ne le comprenons pas et ne combattons pas ces mécanismes, nous serons laminés. C’est pour cela que je parle d’exutoire. L’exutoire est utile, mais il n’est pas suffisant, voire il peut être dangereux s’il n’est pas accompagné d’un mouvement profond d’analyse critique de la façon dont nous collaborons nous-mêmes au système de corruption, de rejet des autres, dont Sarkozy montre l’exemple au plus haut niveau de l’état. Car sans cela, nous allons comme vous le souhaitez, voir les têtes tomber, au sens figuré, naturellement... mais le système se perpétuera à l’identique.
Quand le « Chef » bafoue et transgresse la démocratie d’une manière grossière, mais dans la droite ligne, amplifiée, de ses prédécesseurs, comment répondre ? On peut manier la provocation et la transgression : cela soulage. Mais il faut admettre que d’autres choses sont nécessaires... dont le rappel constant des règles et des valeurs transgressées.
Cordialement.