Rony,
Ce point est très important. Il nous concerne tous.
N’ayez aucun doute que j’abore autant que vous l’usage de la force contre des gens qui semblent ne pas y recourir.
Mais d’abord, est-ce qu’une personne refusant de quitter des lieux où elle n’a ni droit ni titre artificiel use de la force ? Apparemment non. Et si c’est votre logement qu’elle refuse de quitter ?
Bon.
Maintenant sur la Force publique, sur l’Ordre (toutes choses qui, lorsqu’elles sont étatiques doivent prendre une majuscule)
Vous, moi, nous tous, sommes au pied du mur lorsque cette Force que nous voulons ne force pas exactement qui nous voulons mais qui d’autres veulent forcer.
C’est tous ensemble que nous avons voulu l’Ordre mais au cas par cas, c’est mille fois que chacun de nous, pour des raisons personnelles, trouve que cet Ordre en fait trop pendant que d’autres trouvent, sur le même point chaud, qu’elle n’en fait pas assez.
Nous sommes tout autant face à nos contradictions lorsque nous voulons des prisons indignes sans confort ni sécurité et que nous nous y retrouvons suite à quelque turpitude.
C’est exactement par ce que je sais trop bien cette problématique que je mets le doigt là où il fait mal. Nous voulons l’Ordre pour autant qu’il colle à la fois avec notre liberté, notre sécurité et notre bonne conscience.
Ce problème rejoint évidemment celui de la compassion. Nous moulinons qu’il faut que les pauvres soient nourris, soignés lavés et logés mais à titre personnel, nous n’ouvrons jamais nos portes aux SDF. Du coup, nous jouons les Don Quichotte et affirmons que ce sont les autres qui sont égoïstes et méchants.
Brassens avait dit avoir bien pris qu’on l’ait cambriolé. Mais il n’a pas offert ses biens à des clodos. Léo Ferré n’a pas cessé de prétendre au partage mais il s’est insurgé quand il risquait de perdre ses droits d’auteur et trouvait de bons prétextes pour refuser de donner des concerts gratuits « Faut bien que je gagne ma vie quand même ! »
Dans le Monde, dans l’Histoire (là aussi il faut des majuscules) je n’ai encore repéré aucun individu ayant bossé et sué pour acquérir des biens et qui les aurait entièrement offerts à des inconnus.