« L’école est le moyen le plus efficace dont dispose une société pour former ses membres à son image ». Maurice Halbwachs, Préface de Durkheim, L’évolution pédagogique en france, PUF, réédition de 1990.
En ces temps très troublés et plus qu’incertains, où l’humain n’est considéré que dans ses dimensions de futur consommateur et de futur employable flexible, « taillable et corvéable à merci », où la vision que nos politiques ont de notre société est inexistante et fluctuante, il n’est pas surprenant que l’école soit devenue ce qu’elle est aujourd’hui, malgré la résistance d’une large part du corps enseignant.
Nous sommes très loin de la vision humaniste d’un Condorcet qui entendait que l’école développe l’esprit critique ( « former des citoyens qui ne s’en laissent pas conter mais qui entendent qu’on leur rende des comptes »), qui concevait l’instruction comme première et indispensable, qui faisait aux « Lettres » et aux auteurs classiques une part essentielle.
Consulter un manuel de quatrième ou de troisième aujourd’hui donne la nausée : c’est d’une indigence rare et cela ne sert qu’à formater nos enfants pour qu’ils soient en phase avec cette société délétère contre laquelle nous nous battons si nous avons deux sous de conscience. Indigence, et jargon jargonnant... (« reprise anaphorique », pour parler des substitutions possibles évitant certaines répétitions, par exemple ! Celui-ci me vient à l’esprit, il y en a bien d’autres !).
Songer qu’à l’oral du bac, un candidat n’a aucune idée de l’époque dans laquelle on pourrait situer Voltaire, Chateaubriand ou Musset, et n’a jamais lu la moindre page de ces auteurs (ne parlons pas d’oeuvres complètes !) est très révélateur de l’esprit qui anime ceux qui valident les programmes.
Alors, si les parents ont eu le bonheur de disposer de cette culture dont on prive aujourd’hui leurs enfants, il faut qu’ils cherchent par tous les moyens de la transmettre à leur progéniture... et qu’ils fassent en sorte que cette transmission, ce partage, se fasse avec plaisir. Le goût des lettres se transmet et s’apprend, et si l’école d’aujourd’hui (aussi bien publique que privée) ne remplit plus cette mission essentielle, c’est aux parents ou grands parents, quand ils en ont les moyens, de faire
ce travail pédagogique... certes, ce sera une éducation de classe, mais elle aura le mérite d’être !