Bonjour :
S’interroger
sur des origines juives d’Hitler ne peut effectivement n’intéresser que
des antisémites. Mais plus largement, essayer de trouver un lien entre
les origines de cet homme et ce qui s’est passé est à mon avis une
préoccupation de gens qui ont peur.Peur des autres, d’eux même et de la triste vérité ...
Et à juste raison !
On
peut évidemment se faire le coup de la haine de soi, façon Karl Marx,
d’une famille récemment convertie et persuadé que les juifs et les
hongrois étaient par nature impropres à construire le socialisme ( son
gendre Lafarge lui proposa une solution « humaine » finale et sans
douleur, le recours aux gaz modernes parait il) .
Mais se focaliser là dessus c’est
surtout, au delà de l’antisémitisme, retomber dans une pensée
primitive. Chercher dans une personne, les origines de la monstruosité, et dans ses origines, les origines des origines.....
Bien sur Hitler a eu un rôle personnel, Jean Marie Domenach en parle
très bien dans le retour du tragique. Mais cela n’est pas le plus important.
Dans « de la réforme
aux lumière » H.R. Trevor
Ropper ; montre que les dirigeant suivent toujours les aspirations
populaires,
parfois à contre cœur. et sont ensuite considérés comme responsables par
le
même peuple revenu à la raison. Les
revendications sociales du peuple espagnol contraignent rois et
seigneurs à
persécuter les juifs et les maures sans enthousiasme et même avec une
certaine
mauvaise volonté (les seigneurs chrétiens étaient satisfait de leur main
d’œuvre morisque et prenait leur défense).
Les Français applaudissent et amplifient le simple règlement de compte
politique de la Saint Barthélemy Mais c‘est le Roi et Guise qui sont
coupables,
les Allemands donnent à Hitler les moyens de détruire les juifs. Et on
voit chez Domenach, les réticences ,en « privé » des dignitaires
allemands. Mais à la fin, on nous explique qu’ Hitler était fou, génial ou taré.
« Les grands massacres sont ordonnés par les tyrans
mais ils sont imposés par le peuple. Sans le soutien de la société, les
dispositifs de ségrégation et d’expulsion ne sauraient être mis en œuvre.
« Sans les tribuns populaires, la persécution ne
saurait être organisée. Sans le peuple elle ne saurait être imaginée. »
Or, le peuple, c’est nous, nous tous.
Une « généalogie du mal » n’explicite pas sa nature.
l’Allemagne
était notre « cœur ». Le cœur de la civilisation européenne. Sa partie la
plus moderne, la plus évoluée, la plus « civilisée ». C’était, il faut le
rappeler, celle où les juifs étaient les plus intégrés. On voit dans
les souvenirs de Sweig, que les juifs germaniques étaient les civilisés
par excellence au sein du phare de notre civilisation. En devenant
monstrueuse, elle nous a surtout montré, à mon avis, que nous pouvions,
nous aussi être ou devenir des monstres. Au moins que cette monstruosité
était tapie en nous et pas isolée chez l’un ou l’autre individu
pervers. S’attacher à la personne d’Hitler, c’est peut être essayer
d’exorciser le monstre qui est peut être tapie en nous
Le
judaïsme, si on peut parler ainsi, et à la fois une partie de notre
cœur (héritage historique, spirituel, culturel etc..) et notre miroir.
Une partie de nous légèrement décalée qui nous renvoie notre image. Il
est parfaitement logique qu’en période de crise sociale existentielle,
il soit le bouc émissaire le plus évident. D’ailleurs aujourd’hui, des
catégories sociales en crise identitaires sont, non plus antisémites,
mais « antisionnistes », c’est à dire font preuve d’une agressivité
parfaitement disproportionnée eu égard aux enjeux à l’endroit d’Israël,
qui est, a tous égard, dans la région et dans le monde, ce qui ressemble
le plus aux sociétés dont sont issus ces antisionnistes. Ce qui est le
plus proche en pratique de leur propres valeurs. Les Kiboutz, Ben
Gourion, etc... la création d’Israël est aussi un grand projet
socialiste, de gauche, révolutionnaire, marxiste...
Quand
l’hystérie collective mimétique gagne, il n’y a que trois solutions.
Essayer de rester dans son coin (cela marche rarement) allez le sourire
au lèvre et la peur au ventre à la crucifixion, ou participer
joyeusement à l’arrachage collectif de ce cœur de substitution en
espérant que la crise passera avant que l’on soit atteint.
Vous
me direz, on peut aussi se battre. Certes ! cela a été fait avec un
certain succès en 40. Mais pour quel résultat ? 60 après, on retrouve
dans l’espèce de frénésie antisioniste des trucs étrangement familiers.
Et
se battre contre qui ? Parce que l’on revient au problème précédent,
ces gens, les Nazis, les antisionistes, c’est aussi une part de nous,
c’est notre société qui les produits. Il serait trop simple de croire
qu’il suffirait de les faire taire.
Alain Julles est il un
tribun populaire ? Est il un Hitler en puissance ? Est il comme lui ,
pour reprendre les termes de Domenach, un néant ? Un bateleur qui
connait quelques ficelles pour faire parler de lui ? Peut être, mais ce
qui importe plus serait de savoir ce que nous portons en nous tant
collectivement qu’individuellement qui produit ce genre de chose.
Alors quoi ? je ne sais pas très bien.
Il est indispensable
de démonter les clichés éculés et transparent que véhiculent des Alain
Julles. Il ne faudrait pas leur laisser croire que les temps sont déjà
revenus où ont pouvait se faire un nom, une situation, en agitant les
remugles de l’âme humaine. mais il faut, je pense, toujours garder à
l’esprit, qu’Alain Julles et
consorts, ne sont pas,« le ventre fécond dont sortit la bête immonde »,
tout comme Hitler n’était pas étranger à l’humanité. Tous sont comme
nous, des êtres humains qui pédalent dans la même choucroute que nous.
Même si ils en sont encore, comme Hitler, a désespérément chercher qui
porte le« mal » en imaginant qu’une fois celui là éradiqué, on pourra
vivre enfin sans avoir peur.
Peut être faudrait il ajouter à votre utile critique une parole affectueuse pour montrer
qu’on ne les prends quand même pas trop au sérieux et qu’on les aime
bien quand même ? Leur dire, n’ayez pas peur. Le fond du problème est en vous, comme en nous, donc à nos portée ?