• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Fred95

sur Contrat première embauche : bouc émissaire des universités


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Fred95 (---.---.224.10) 5 mars 2006 17:51

Salut Aurélie,

Mon diplôme de départ n’a rien à voir avec la communication et l’édition : ce n’était et ce n’est toujours pas mon domaine de compétences. En fait, j’ai suivi une filière technologique en intégrant l’IUP de Bâtiment et Travaux Publics à Neuville, après une première année de DEUG MIAS (Maths et Info). Je ne pensais pas du tout faire ça au départ (je voulais être prof de maths) mais je n’ai pas du tout aimé la façon dont on enseignait les maths à la fac, et surtout la physique. Du coup, lorsqu’on est venu me présenter cette filière à mi-chemin entre le DUT et le diplôme d’ingénieur, cela ne m’a pas pris longtemps pour me décider à y entrer. Mon tempérament rebelle a fait le reste. Comme toi, je ne voulais pas être formaté, tout le monde voulait que je fasse Bac+5 (ne serait-ce que pour le salaire) et j’ai donc décider d’embêter mon monde en sortant à Bac+4 (le master n’existait pas à l’époque).

La partie n’était pas gagnée pour autant car le diplôme de l’IUP était encore peu connu des entreprises il y a 8 ans, j’ai souvent dû justifier de ma formation et il est clair que j’en ai souffert au niveau salarial (je faisais un boulot d’ingénieur, longtemps payé comme un DUT/BTS). En revanche, je n’ai jamais eu de problèmes pour trouver du boulot comme je t’ai dit mais cela a plus été grâce à de bonnes rencontres que grâce à mon diplôme. (Du coup, je ne peux pas vraiment te dire quelle est la réputation de la fac de Cergy auprès des entreprises.)

En fait, c’est mon stage de fin d’études (3 mois) qui m’a mis le pied à l’étrier. Sur les 15 candidatures que j’avais dû envoyer, je crois que je n’ai reçu qu’une réponse positive (toujours cette galère pour avoir sa première chance, nous retombons dans le débat du CPE), et c’était parce que la boîte avait déjà pris dans le passé un stagiaire qui venait de mon IUP : son maître de stage, qui est devenu le mien par la suite, avait été très satisfait de son travail et c’est pour ça surtout qu’il a décidé de me prendre en stage. Tu peux voir que dans cette affaire, c’était surtout la qualité de la personne qui avait compté (je parle de mon prédécesseur bien évidemment !), plus que son diplôme.

Mon stage de fin d’études s’est très bien passé et tout s’est enchaîné par la suite, par relations. Il faut dire que le monde dans lequel j’ai travaillé (la climatisation industrielle) était relativement petit : les gens travaillaient pour une boîte puis la quittaient pour en intégrer une autre. Dans leur mouvement, ils débauchaient un ou plusieurs collaborateurs pour les accompagner : cela a toujours été mon cas, on faisait appel à moi.

Effectivement, ça a été au départ une succession de contrats d’intérim (à ce sujet, je suis désolé, je ne voulais pas te faire peur). D’une part, cette période n’a duré qu’un an environ, ensuite j’ai signé un CDI qui s’est soldé 3 ans plus tard par ma démission. D’autre part, il faut savoir que la boîte qui m’a offert mon premier job (et qui était celle où j’ai effectué ce fameux stage) était dans une posture délicate à ce moment précis de son histoire : elle se faisait racheter par une autre, n’avait aucune idée de ce que serait son futur et c’est donc tout ce que le directeur pouvait me proposer. Enfin, quand je parle d’une « succession » de contrats en intérim, il y en a eu effectivement un certain nombre mais dans seulement deux boîtes. C’était juste une façon de rester dans la légalité pour l’entreprise, en jouant sur la durée des contrats et leur justification. Donc en gros, je n’ai pas vraiment vécu cette période comme de la précarité : j’étais plutôt content d’avoir un job, de me faire de l’expérience et de gagner un peu plus avec les primes d’intérim. Il est vrai que je n’avais pas vraiment à me faire du souci pour le logement puisque j’étais alors chez mes parents. Je finirai cette partie en disant qu’après mon CDI, c’est moi qui ai choisi de faire de l’intérim : par rapport à mon poste en fixe, j’avais beaucoup moins de responsabilités et de stress, et j’étais beaucoup mieux payé. Pour moi, il n’y avait pas photo... surtout que j’étais en train de changer radicalement de direction professionnelle.

Quelqu’un a réussi à me convaincre de faire le grand pas et c’est effectivement ce que j’ai fait : j’ai lâché un métier qui me pesait (j’étais un « technicien » qui détestais la technique...) et je suis parti à l’aventure en acceptant un poste de stagiaire/assistant dans une école primaire aux States. C’était clairement un changement mais cela a été salutaire. Je voulais enseigner mais je pensais plutôt que ce serait au niveau collège ou lycée. Et finalement, cela s’est très bien passé avec les enfants. Cela se passe en fait si bien que depuis mon retour en France il y a deux ans, je bosse comme instit’ dans une petite école privée. Le salaire n’a rien à voir avec les 2500 euros nets que je touchais chaque mois dans la clim, mais je ne regrette pas du tout mon choix. Je suis très heureux à ma place, j’adore mon boulot et même si celui-ci me fatigue plus que le monde industriel, je trouve cette fatigue utile puisqu’elle est consacrée à ces petites têtes blondes.

En gros, après un parcours assez atypique, je me retrouve à faire ce que j’aime :
- j’ai toujours voulu enseigner et même changer le système éducatif, c’est ce que j’essaie de faire modestement à l’échelle de ma petite école ;
- je me suis toujours senti « généraliste » et avec mes CM2, je peux conjuguer mon goût pour les maths, les sciences avec les langues, le théâtre, le sport... Que demander d’autre ?

Pour conclure ce long témoignage et revenir à un peu plus au débat (j’espère ne pas avoir ennuyé les autres lecteurs mais je n’avais pas d’autre choix), j’aimerais quand même souligner que si j’ai eu mon job actuel, c’est parce que je suis tombé sur un directeur qui n’apportait aucune importance aux diplômes (je n’ai rien dans ce domaine) et pas trop à l’expérience (je n’en avais pas beaucoup il y a deux ans) mais surtout à ma vision de l’éducation. J’en ai parlé dans un autre post, et comme c’est assez rare de rencontrer de tels « patrons », je voulais encore le souligner. A la limite, on aurait plus besoin de patrons de ce genre que d’un nouveau contrat de travail.

Voilà, je te remercie en tout cas pour tes précisions concernant ton stage et je te souhaite de le finir (je ne sais pas quand) dans les mêmes conditions que tu l’as commencé. Ne te fais pas trop de bile par rapport à ton avenir : CPE ou pas, on finit toujours pas s’en sortir si on en veut. Parfois, cela tient simplement à de bonnes rencontres. Tiens au fait, puisque tu es dans le marketing, l’édition et la comm’, j’aurais peut-être besoin de tes services le jour où je voudrais faire publier le livre de maths sur lesquel je suis en train de bosser. On ne sait jamais, tu pourrais avoir gardé des relations haut placées dans le milieu de l’édition ;)

A bientôt.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès