Y en a qui s’emmerdent avec du pognon, hein ? J’l’ai entendu dire, moi !
Y a des mecs bourrés de pognons... ils s’emmerdent, hein ! Nous on s’emmerde pas mais on en a pas...
On s’fait pas chier ! Moi, j’ai trouvé une combine maint’nant. Euh.. j’achète tout à crédit alors, euh...
C’est retenu sur ma paye. Y a des fins de mois, je touche tellement peu que j’sais pas si je bosse ! C’est bonnard !
Par exemple, la euh... je viens de m’acheter une maison de campagne, au bord de la mer !
Ça s’appelle comme ça, je m’excuse ! je l’ai achetée à crédit, enfin, à côte de crédit... pas loin !
C’est une maison de campagne en Normandie parce que c’est là que c’est le moins cher comme bord de mer.
Enfin c’est pas là qu’il fait le plus beau, mais enfin, c’est beau dejà !
Et pis, on a beaucoup exagéré avec le climat de la Normandie, hein !
Moi je vois, j’y suis allé trois fois cet été, il a pas neigé une seule fois.
Et puis...euh... le climat est très sain pour celui qui supporte les botes en caoutchouc.
Et puis, le mec qu’est copain avec une grenouille, il l’emmène, elle est contente !
Non ! Évidemment ! En Normandie il pleut un petit peu, mais en France, il pleut partout un petit peu.
En Normandie, il pleut un petit peu partout....bon !
Alors moi, j’ai acheté une maison Merlin. Voyez ?... Maison Merlin, cage à lapin. Bon !...
J’ai pris un crédit personnalisé à long terme.
Parce que chez Merlin, c’est le crédit qu’est cher, c’est pas la maison, hein !
Parce que quand on voit la maison, on se dit :
C’est pas vrai ? Ça a pas couté ce prix là !
Non, non. C’est le crédit qu’est cher.
Ah bon, tu m’as fait peur !
D’ailleurs, la preuve, c’est quand on a fini de payer, si on pouvait
revendre le crédit, on se ferait plus de pognon qu’en revendant la
maison, hein !
Bon alors j’ai pris un crédit personnalisé à long terme.
Personnalisé, c’est chacun le sien. A long terme, ca veut dire que c’est un prêt, si vous voulez, mais de loin...
A long terme, ca veut dire que moins tu peux payer, plus tu paye. C’est à dire... euh... non, c’est pas ça !
La formule de Merlin, c’est : Pendant le crédit, tu répare c’qui s’écroule, et au bout de 15 ans les ruines sont à toi.
Bon alors... euh...
Alors dejà dans la vie, peinard, et alors au boulot maintenant, j’suis syndiqué.
Je suis t’a F.O., Force ouvrière. Gardez vos forces, les ouvrier ! F.O., c’est sérieux comme syndicat.
« F.O., voilà un syndicat qu’il est beau ! F.O., le syndycat qu’il vous faut ! »
C’est un syndicat qu’est très bien parce qu’il est le plus petit.
C’est celui qui fait le moins grève... donc, on gagne plus.
Quand on est obligé, on la fait, parce que sans ça, ça se verrait...
Mais c’est toujours nous qu’on reprend le boulot le plus vite, hein !
Je vois à mon usine on est sept.
C’est le plus petit, comme syndicat, c’est le plus petit. Alors il est un peu sur la corde raide.
Si il penche trop du côté des ouvriers, les patrons payent plus.
Et puis si il penche trop du côté des patrons, ça va finir par se voir !
Vu que c’est eux qui payent, et c’est pas le but de la manoeuvre !
Bon parce que vous comprenez, les syndicats ils sont un peu dans une situation délicate !
Des fois, j’entends des ouvriers qui disent : « Oh mais, tout ça, les syndicats sont complices ! »
C’est pas vrai ! pas tous ! La plupart, mais pas tous !
Parce que par exemple, prenez le problème :
en France, vous avez 20 millions de travailleurs, je compte les chômeurs, hein ! sans quoi ça ferait moins...
20 millions de travailleurs et il y a 2 millions de syndiqués, les chomeurs d’ailleurs !
Bon ! Alors, c’est pas compliqué. Vous allez faire la grêve a 18 millions de mecs pas inscrits...
C’est pas un problème, ça !
Leur faire reprendre le boulot quand les revendications n’ont pas abouti... c’est plus dur !
Parce que en 68, les ouvriers de chez Renault, ils avaient dit à Seguy :
« Eh ben les accords de Grenelle vous avez qu’à vous les tailler en pointe ! »
Alors lui, il peut pas ! C’est un homme, il est tout rouge, il a dejà autre chose...
Ou alors il se maquille avec un gant de crin...
Bon ! Alors moi, je suis délégué syndical, moi !
A mon usine, j’arrive le matin :
"Camarades, nous étudierons aujourd’hui la contestation syndicale face au grand capital !
Camarades, la contestation syndicale est née du capital, elle est engendrée par le capital.
Le capital est donc plus important que la contestation car la contestation... ne vit pas de ce qu’elle conteste !
Alors que le capital vit de sa contestation !"
Je vais vous rassurer tout de suite : les autres ne comprennent
pas non plus ! Mais au moins, ça fait plaisir aux mecs de savoir qu’ils
sont compris par des mecs qui comprennent des trucs qu’on comprend pas.
Parce qu’on est pas cons, au syndicat. On fait croire qu’on comprend, hein ! On est pas con !
Et puis moi, j’ai repéré un truc : le ton compte beaucoup, les gestes aussi !
Là, je vais vous faire un exemple :
Camarade balayeur, grâce au syndicat et par le truchement du dialogue, tu seras l’égal du patron !
Dans le dialogue, hein !
Parce que dans le détail, tu sera payé moins et puis c’est toi qui continueras à balayer la cour !
Ah bon ! J’perds pas mon boulot ?
Non, non.
Oh ben, ça va alors !
Alors, moi, comme je suis délégué, je suis très bien reçu. Je suis reçu par le patron... à la campagne :
« Entrez, mon ami ! Asseyez vous, c’est du cuir ! Touchez à mon chien, vous connaissez ma femme ? »
Bon. Ou le contraire. Ça dépend de la taille du chien !
Bon. Alors ? Vous fumez le cigare ?
Non, mais je tousse !
Ah, pauv’con..
On était en train de parler à bâtons rompus, que je préfère à brule-pourpoint parcequ’on s’brule... Bon !
Quand il m’a demandé, quand c’est qu’on arrête la grêve. Alors moi je lui ai repondu :
« Ben... C’est quand vous voulez, c’est vous l’patron ! Ça dépend du stock ! »
Parce que moi, j’suis dans une usine où c’est que la grêve dépend directement du stock !
Je vais vous expliquer... Y a des usines comme ça, que la grêve dépend du stock.
Par exemple vous avez : Lip... Vlan ! Boussac... Vlan !
Manufrance... Ne m’appelez plus Manufrance ! La France elle m’a laissé tombé !
Mais Zorro va arriver. Ta da ta da !
Bon. Vous prenez des usines, comme Longwy, dans l’Est...
C’est des usines qui fabriquent des pièces de fonte qui vont sur des
machines à vapeur qu’on a donné aux Indes. Alors c’est dur d’en vendre,
hein ! Parce que, c’est des usines qui appartenaient à l’état, ça,
avant !
En moitié, vous savez ? Ils avaient pris des parts, comme ils disent. Pour renflouer, c’était déjà trop tard !
Puis alors, comme les gens du gouvernement ils sont pas là pour
rester, parce qu’après ils se barrent, alors ils prennent un peu de...
et puis il se cassent !
Alors, les mecs, ils se retrouvent avec leurs usines.
Parce que le maire de Saint-Etienne, c’est un maire communiste.
Il savait pas pourquoi il avait été élu aussi facilement ! Il vient de comprendre. Il a fait :
« Bon sang ! Mais c’est bien sûr ! »
Alors, parce que la société, c’est une chaîne... C’est une chaine, la société !
Salut les maillons !
Bon. Vous avez l’état, le patron, le syndicat, l’ouvrier, la police, l’état, le patron, le syndicat, l’ouvrier, la police...
Quand on a trop de gens qui gueulent dans la rue pour avoir du boulot, on leur envoie les flics pour leur casser la gueule. Ben, c’est un truc nouveau, ça vient de sortir.
C’est que quand on a des mecs qui gueulent pour avoir du boulot, on leur casse la gueule :
« On veut du boulot ! »
« ...Salauds ! »
Vlan ! Hé, ça fait toujours du boulot pour les flics alors là, si vous voulez !
Quand y a trop de mecs dans la rue, l’état dit aux patrons :
« Engagez-moi donc des chômeurs qui font désordre, parce qu’on doit recevoir Helmut Schmidt. »
Bon... ça fait desordre, ça va crier avec de la pancarte. Tout ca pue ! Bon. Alors l’autre, il engage les chômeurs.
Et puis alors, c’est là que le stock il intervient, parce que du coup, il fabrique encore plus qu’il ne vend !
Donc, le stock se remplit et quand le stock est plein, le patron, il peut plus bosser !
Il se retourne vers son partenaire social, qu’est le syndicat et lui dit :
« Mon pauv’gars, on va débaucher une certaine catégorie de personnel ! »
Le syndicat appelle à la grêve :
« A LA GRÊVE ! » Prenez des notes, hein ! parce que je vais pas répéter, hein !
Les ouvriers :
Qu’est-ce qu’y a ?
C’est la grêve !
Ben, y viennent d’embaucher !
Ben, y débauchent !
Ah bon, ! Salauds ! Le patron, rengagez nos camarades ! Aie ! Euh...(Pan sur la tête)
Aie ! Salut Roger ! T’es dans la police maintenant ! Aie !
Pardon , s’il vous plait, m’sieu l’agent... Aie ! La République ?
C’est par là ! (Vlan ! )
Bon. Alors la grêve dure des fois trois semaines, des fois même trois semaine, voire même...
Y en a deux qui suivent ! c’est intéressant, non ?
Pendant les trois semaines, qu’est-ce qu’il fait le patron ?
Il vend ce qu’il a dans son stock ! Il a pas besoin des ouvriers qui fabriquent, pour vendre.
Alors, au bout de trois semaines, il a tout vendu. Il dit :
« Voilà les mecs... vous avez gagné. Je rengage tout le monde ! »
Et les mecs retournent bosser :
« On a gagné ! On a gagné ! On a... à part les trois semaines qu’on a dans le... !
»Bon, le problème, a dit le patron, y a deux problèmes :
y a un problème du côte patron, et y a un problème du côte ouvrier qui se fait sentir ! "
Ça sent le problème, ici...
Le patron, quand il rembauche les ouvriers, il est obligé de les
augmenter, après la grêve. C’est embêtant ça ! D’ailleurs, il m’a dit :
"C’est ça le problème, parce que, vous comprenez, les ouvriers, il sont
bien gentils, moi je les aime bien, moi les ouvriers, et puis il en faut ! Surtout des pauvres !"
Il m’a dit : « Les ouvriers, ils demandent ça. On leur donne ça ! Bon, mais ils le prennent ! On est embêtés ! »
Et alors du côté ouvrier, il y a un problème : C’est que la grêve, c’est pas payé !
Vous comprenez ? Sauf dans les grandes administrations, mais ça, c’est pas payé, la grêve. Alors un mec qui dit :
« On a gagné ! On a gagné ! » Ben, ils ont perdu trois semaines !
Alors y avait des remous !
"Ouais, euh... Ouais, le syndicat nous a fait faire la grêve. Tout ça,
euh... on a gagné ta ta ta... Tu vas voir Ta ta ta ! On a paumé trois
semaine, oui !"
J’ai dit : " Camarades, camarades !
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