De l’information, pour ceux qui en lisent :
Revirement judiciaire dans l’affaire de Villiers-le-Bel
Volte-face dans
l’enquête sur le décès de Mushin et Lakamy, ces deux jeunes percutés en
novembre 2007 par une voiture de police à Villiers-le-Bel (Val-d’Oise).
La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles a décidé de
mettre en examen un policier pour « homicide involontaire ». Et ce
alors que, après plusieurs mois d’enquête, la juge d’instruction de
Pontoise avait, elle, conclu à un non-lieu. Les avocats des proches de
deux défunts se sont félicités de ce revirement, estimant qu’il
s’agissait d’une « nouvelle apaisante pour les familles ».
Pourquoi la justice
a-t-elle d’abord opté pour un non-lieu ?
La juge d’instruction en charge du dossier a, il y
a un an très exactement, requis un non-lieu en faveur des policiers
ayant percuté les deux jeunes au motif que les forces de l’ordre avaient
été surprises par la mini-moto des adolescents. Pour la magistrate, le
décès des deux jeunes ne devait être imputé qu’au comportement de ces
derniers – qui roulaient sans casque et avec un véhicule non homologué.
Dans ses conclusions, la juge avait finalement choisi de ne pas
prendre en compte la vitesse de la voiture de police au moment de la
collision. Et ce alors même qu’une expertise attestait que les forces de
l’ordre roulaient au-delà de la vitesse maximum autorisée. C’est dans
ce contexte que les avocats des familles s’étaient décidés à saisir la
cour d’appel de Versailles.
Pourquoi l’un des
policiers est-il finalement mis en examen ?
La chambre de l’instruction de la juridiction
versaillaise a ordonné un supplément d’information en avril dernier et
désigné son président, Gérard Poirotte, pour le mener. « Il a pris en
considération la fameuse expertise, ce qui a abouti à la mise en examen
du conduc teur de la voiture de police, se félicite Me Emmanuel
Tordjman, l’un des avocats des familles. Les experts montraient en effet
que – contrairement aux dires des policiers – la voiture dépassait les
50 km/h et qu’elle était même en phase d’accélération au moment de la
collision. »
Selon l’analyse des capteurs du système ABS, le véhicule serait
passé de 59 km/h à 64 km/h juste avant l’accident. Le juge Poirotte va
donc réentendre le policier mis en examen afin de le confronter au
rapport d’expertise, ce que la juge d’instruction de Pontoise n’avait
pas fait. Les avocats des familles ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils
souhaitaient assister à l’audition.
D’autres mises en examen
peuvent-elles suivre ?
Si le conducteur venait à reconnaître qu’il
roulait au-delà de la vitesse autorisée, ses trois collègues policiers
pourraient être à nouveau interrogés. « S’il était avéré qu’ils
mentaient lors de leurs premières dépositions, ils pourraient perdre
leur statut de simple témoin et être, eux aussi, mis en examen pour
“faux témoignage” », explique l’avocat des familles.
Qu’on ne s’y trompe pas toutefois : la nouvelle tournure des
investigations ne préjuge pas de l’issue de l’enquête. Car ce n’est
qu’une fois le supplément d’information achevé que les juges décideront
le renvoi ou non des policiers devant la justice.