Je crains que votre analyse, notamment en terme de politique de la ville, soit difficilement soutenable. Ainsi dire que le nombre de sans logis est faible ou en baisse aux Etats-Unis, c’est énoncer une contre vérité flagrante.
La structure typique de la ville nord-américaine se présente comme un emboîtement de cercles concentriques : Au centre, un « cbd » (central business district, le quartier des affaires) puis une première couronne composée d’habitat très dégradé Enfin une « banlieue » extrêmement étendue et peu dense (l’étalement urbain, freiné en France, a été encouragé aux Etats-Unis).
La première couronne a été fuie de tout ceux qui le pouvaient : classes moyennes, classes populaires supérieures... Ceux qui restent sont ceux qui n’ont pas eu les moyens de s’installer dans les banlieues pavillonnaires : les plus pauvres d’une part, et la population noire de l’autre (car même si on ne peut plus légalement faire figurer l’interdiction de vendre un bien immobilier à des noirs dans les statuts des associations de quartier de la banlieue, ce principe reste bien souvent appliqué dans les faits).
Cette fuite a été suivie de la fuite des activités économiques, et donc des emplois, vers la périphérie. Les autorités locales ayant restreint autant que possible les impôts, il n’existe pas de transport en commun de sorte que ceux, très nombreux parmi les habitants de cette première ceinture, à ne pas pouvoir acheter de voiture ou d’essence pour utiliser quotidiennement leur véhicule, sont de fait coupés de toute possibilité de trouver un emploi, et donc de déménager. La boucle est bouclée.
C’est parce que ces quartiers piègent en leur seins leurs habitants (les chercheurs américains parlent de « trap ») qu’on peut nommer ses poches de pauvreté ghettos.
Or depuis une vingtaine d’années, on assiste à l’échelle globale, à l’émergence d’un « archipel mégapolitain mondial », c’est à dire d’un réseau de centres urbains repartis sur toute la planète regroupant une grande part des activités financières, de direction, de recherche, d’innovation (dont la valeur ajoutée est très importante). Dans les villes concernées, cela a pour conséquence l’apparition d’une classe supérieure aux très hauts revenus travaillant dans le CBD et cherchant à habiter à proximité. Des parts importantes des quartiers dégradés sont détruits et remplacés par des habitats de haut standing aux loyers extrêmement élevés. Loyers que bien sûr les anciens locataires ne peuvent pas payer. C’est ce qu’on appelle la gentrification.
Dans le même temps l’habitat social est systématiquement détruit, accroissant de ce fait encore la demande locative sur les habitats dégradés, et donc les loyers. Le résultat final est une explosion de l’habitat de fortune (camionnettes, camping-cars, voitures...), de l’économie informelle (trafics en tout genre, travail au noir dans le domaine du textile, mais surtout du service pour remplir à peu de frais les besoins des nouveaux habitants du CBD). Et c’est toute une frange des habitants du ghetto qui se trouve aujourd’hui sans domicile. Si à la grande époque de l’école de Chicago, les clochards étaient des marginaux et des gens libérés des asiles psychiatriques qui fermaient les uns après les autres, les sans logis sont aujourd’hui des familles entières de travailleurs informels et de chômeurs piégés par leur impossibilité de se déplacer. Et leur nombre a littéralement explosé.
Je vous encourage à lire Saskia Sassen, professeur de sociologie à l’université de Chicago et auteur qui fait autorité sur ce thème (La ville globale. Londres, New York, Tokyo).
Alors pitié, ne citez pas les Etats Unis comme exemple du traitement du problème du logement ! Et encore moins Harlem !!
Pour finir je tiens à préciser que les statistiques de la pauvreté cités dans le premier commentaire sont parfaitement justes mais que si en France on situe le seuil de pauvreté à la moitié du revenu moyen national (ce qui est déjà bas), au USA ce seuil est la limite financière en dessous de laquelle il est impossible de payer la nourriture nécessaire (et donc en dessous de laquelle sans aide non gouvernementale ou ressource informelle, travail au noir, etc..., ces gens seraient en état de malnutrition). Le seuil de pauvreté américain est donc bien plus bas que celui qui sert de base aux statistiques françaises. Si on appliquait l’équivalent de notre seuil de pauvreté reporté à l’indice des prix américain, le nombres des habitants situés en dessous de ce seuil serait bien plus grand !
10/01 16:07 - Gastalk
Au risque de déplaire aux commentaires de cet article, les chiffres sur les dépôts de bilan, (...)
09/01 15:43 - Glouglou
Daniel martin n’est rien si ce n’est un quelconque « blogeur » qui se prend pour (...)
09/01 15:30 - eric
J’ai beaucoup apprécié cet article qui reflète malheureusement une grande partie de la (...)
08/01 15:14 - l’Omnivore Sobriquet
L’insupportable et très soviétoïde exercice de bile de Canal plusse. A propos de SDF, (...)
08/01 13:13 - erwan
bien d accord avec toi, notre systeme permet justement a tous les gens de s exprimer, ici ils (...)
08/01 13:06 - FYI
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