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Commentaire de easy

sur « Black Swan », danse avec les signes


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easy easy 14 février 2011 19:45

 Euh.

Aronofsky est à mes yeux davantage un extraordinaire observateur des visions intimes des autres qu’un artiste.

Par exemple ; Tarkovski, Beneix, Kusturica, Rohmer, Lang, Chaplin, Visconti, en fait la très grande majorité des cinéastes sont des artistes au sens où ils nous montrent la réalité à travers leur grille de lecture, leur poétisation.

Rien, dans ce que Chaplin nous montre, ne correspond à la réalité objective, perçue de puis l’extérieur des gens, et si ça correspond à la vision intime et personnelle d’une personne, c’est de la sienne. Ce n’est pas la vision du Kid qu’il nous montre mais celle de Charlot.



Dans Black Swan, le cinéaste ne transforme rien. Il ne se veut pas artiste comme Picasso ou Dali. Il se veut scientifique et soucieux de montrer la vérité interne de ses personnages. Tout ce qu’il nous montre vient de la pensée de la danseuse étoile. C’est un peu ce qui est fait par Hackford dans Ray. Il y a cette manière également dans Voyage au bout de l’enfer. Alan Parker l’avait fait avec Birdy, et c’est aussi le principe de The Wall. On entre dans les délires des personnages.

Il suffit de suivre de près une fille pour qui la danse est l’alfa et l’oméga pour l’entendre dire qu’à un moment, tout se passait si bien dans le spectacle du Lac des cygnes, elle se sentait tellement en grâce, la musique la portait tellement, qu’elle s’est sentie des ailes (le rôle exigeant que la danseuse s’identifie à un cygne et batte des bras comme des ailes).

Quand on a entendu une danseuse étoile dire ça et qu’on veut montrer dans un film ce délire, cette transfiguration exigée, appelée, attendue par le public, il ne reste plus qu’à suivre pas à pas la métamorphose, augmenter la présence de la musique, augmenter la présence d’un public enflammé et ajouter progressivement des plumes aux bras de la danseuse. Et cela, seul le cinéma, surtout de nos jours avec les effets spéciaux, permet de le faire. 


Pour le dire autrement. Victor Hugo, quand il nous raconte Cosette, il s’arrange pour nous émouvoir aux larmes d’un spectacle que nous avions pu observer sans ressentir pareille émotion. Il est artiste et éveille en nous la pitié, l’amour, la compassion, le pardon.

Dostoïevski part de faits divers ordinaires qui nous émeuvent par leur horreur et que nous rejetons. Puis il nous fait visiter la pensée des protagonistes et nous fait vivre leurs déchirements. Il agit comme un psychanalyste méticuleux de rapporter la vérité des individus. Et explorer la pensée intime des gens, c’est quelque chose de très déstabilisant car chacun de nous y retrouve ses anges et démons.


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