@Souffle
Eh bien, en fait... oui. Il y a même un livre très connu qui l’explique en long, en large, et en travers : « Psychologie des Foules » de G. Le Bon, publié en 1895.
Si on résume très schématiquement, la thèse de Le Bon est que ce qu’il appelle une « foule psychologique » se comporte d’après certaines lois très particulières. L’une d’elles est justement qu’elle est irrationnelle et absolument imperméable à la logique la plus rudimentaire, tout en n’ayant qu’une mémoire à très court terme. C’est extrêmement lourd de sens et de conséquences. Une autre loi est qu’une foule se laisse volontiers guider par l’imaginaire. Peu importe ce qui dit l’orateur, à partir du moment où il fait rêver l’auditoire, qu’il sait employer les bonnes images et les mots les plus frappants, avec le ton qu’il faut, il a gagné. Enfin, une foule est imprégnée de ce que Le Bon appelle « l’âme du peuple », et qui correspond grosso-modo aux représentations et archétypes sociaux dominants. Tel peuple n’est pas sensible aux mêmes idéaux que tel autre, ni réceptif aux mêmes thèmes. On ne parle pas de la même façon à des Allemands, à des Anglais ou des Français, et surtout, on ne leur parle pas de la même chose. Il suffit donc de dire à peu près n’importe quoi à un maximum de gens, tout en le disant de la bonne façon.
C’est exactement ce qu’a fait Sarkozy en 2007. Sa campagne a été la mieux médiatisée, le mieux relayée, et il a le mieux parlé. Royal n’avait aucune chance, et la couleur politique n’a rien à voir là-dedans.
Cela dit, la thèse de Le Bon n’est pas la seule explication, mais elle reste l’une des plus pertinentes.