Après Angelides, Barofsky condamne le renflouement
Dans une tribune intitulée « Là où le renflouement a foiré » publiée dans le
New York Times du 29 mars, l’inspecteur général du plan de renflouement américain TARP Neil Barofsky [
*],
constate l’échec patent de la politique publique de sauvetage de Wall
Street et des banques européennes. Barofsky rejoint ainsi les rangs de
ces gens du système, à l’image de
Phil Angelides aux Etats-Unis ou
Jean Paul Delevoye en france, fustigeant un système condamné.
Le texte de Barofsky met en accusation le secrétaire au Trésor Tim
Geithner et l’administration Obama. Si, à l’image de George W. Bush Jr.
sur la Guerre en Irak, « le gouvernement [Obama] a déclaré sa mission accomplie (…) j’ai le regret de dire que je ne suis pas d’accord » . Le renflouement n’a fait que profiter aux banques géantes
« qui jouissent désormais de bénéfices records et d’un avantage
compétitif qui semble permanent pour celles que l’on considère ’trop
grosses pour faire faillite’ ». De surcroît, le plan TARP a failli
dans tous ses objectifs envers la population – « Main Street » – alors
que ces mesures avaient permis son adoption par le Congrès.
« L’emphase du projet de loi sur le sauvetage des propriétaires
de logement fut particulièrement vital pour son adoption. On a dit au
Congrès que le TARP servirait à acheter 700 milliards de dollars
d’hypothèques, et pour obtenir les votes nécessaires, le Trésor a promis
qu’il modifierait ces hypothèques pour aider les propriétaires en
difficulté. En effet, la loi mandate expressément le département du
Trésor pour faire cela. Mais il n’a fait que bien peu pour se conformer à
ce compromis législatif. Quasi-immédiatement, tel que permis par le
langage vague de la loi, le plan du Trésor est passé du rachat
d’hypothèques à l’infusion de centaines de milliards de dollars dans les
grands établissements financiers du pays ; ce changement a été opéré en
promettant expressément que cela permettrait de rétablir le crédit.
« Cependant, le Trésor a versé l’argent aux banques sans
politique effective ou de volonté pour les obliger à prêter de nouveau.
Il n’y avait aucune contrainte : pas de condition ou d’incitation à
accroître les prêts aux acquéreurs de logement, et même, contre nos
propres recommandations, pas d’exigence que les banques rendent compte
de leur utilisation des fonds du TARP. Ce n’est qu’en avril 2010, en
réponse à nos recommandations, que le Trésor a demandé aux banques de
fournir ces informations, bien après que les principales banques aient
remboursé leurs emprunts. Il n’est donc pas surprenant que le crédit
n’ait pas repris et même poursuivi son déclin pendant la reprise.
« Dans le même temps, l’objectif d’aider les propriétaires de logement en difficulté a été suspendu jusqu’en février 2009, au lancement du Home Affordable Modification Program
qui devait aider 4 millions de familles a rééchelonner leurs
hypothèques. Ce programme s’est avéré un échec colossal puisque le déjà
faible nombre de modifications permanentes (540 000) a été moindre que
celles ayant raté ou été annulées (plus de 800 000). C’est le bilan
souvent évoqué d’un programme lancé en toute hâte, dont les défaillances
tiennent à sa conception, (…) et du refus de tenir pour responsables
les fournisseurs d’hypothèques aux performances abyssales pour leur
indifférence vis-à-vis des directives du plan. Alors que le programme
piétine, les saisies immobilières poursuivent leur ascension avec une
prévision de 8 à 13 millions de dossiers sur la durée de vie du TARP.
« Le secrétaire au Trésor, Tim Geithner, a reconnu que le
programme ne remplirait pas, et de loin, ses objectifs initiaux (…) mais
ses représentants refusent toujours d’agir sur ces insuffisances. Au
lieu de cela, ils continuent de soutenir avec entêtement que le plan est
un succès et qu’aucun changement n’est nécessaire, assurant ainsi que
les engagements envers Main Street ne seront pas honorés.
« Au final, on avait assuré au pays que la réforme de la
régulation se concentrerait sur la menace que pose à notre système
financier ces grandes banques qui jouissent d’une garantie effective du
gouvernement, quelle que soit la dangerosité de leur comportement. Cette
promesse aussi semble s’être envolée. Les plus grosses banques sont 20%
plus grandes qu’avant la crise et exercent un contrôle sur une part
sans précédent de notre économie. Elles supposent raisonnablement que le
gouvernement leur viendra à nouveau en aide si besoin. En effet, les
agences de notation incorporent les futures renflouements publics dans
leurs évaluations des grosses banques, éxagérant ainsi les distorsions
du marché qui leur donne un avantage injuste sur les établissements plus
modestes qui continuent à se battre pour leur survie.
« Pire, le Trésor a apparemment décidé d’ignorer plutôt que de
soutenir les efforts réels de réforme, tel que ceux fournis par Sheila
Bair, la présidente de l’Agence fédérale de garantie des dépôts (FDIC),
en vue de rétrécir les établissements financiers les plus complexes. »
Cette politique, c’est le Glass-Steagall de Franklin Roosevelt dont
la réinstauration équivaudrait à une mise en liquidation judiciaire des
spéculateurs. Les responsables politiques qui ne le comprennent pas, ou
pire, qui ne le veulent pas, contribuent à nous précipiter dans le mur.
Machine arrière toute !