Libye : une entreprise française participait à la répression
Le groupe informatique français Bull et sa
filiale Amesys auraient activement contribué à l’espionnage de
l’opposition libyenne par Mouammar Kadhafi. Un reportage du Wall Street
Journal dans un ancien QG des services de sécurité et des images
tournées par la BBC viennent de le confirmer.
Ce mardi, deux reporters du Wall Street Journal racontent leur visite dans le bâtiment
d’où le régime libyen surveillait les communications. Ils y ont
notamment retrouvé des manuels rédigés en anglais, mais portant le logo
d’une entreprise française, Amesys, filiale du groupe Bull.
Un reportage de la BBC
confirme, en images, le rôle de la société française. Des documents
retrouvés dans le bâtiment abandonné sont bien signés d’Amesys. (Cliquer sur l’image pour accéder au reportage)
Le colonel Kadhafi se méfiait d’Internet, même si, comme le souligne
le Wall Street Journal, la Libye ne comptait que 100 000 abonnements,
pour 6,6 millions d’habitants. Selon le quotidien américain, il aurait
fait appel à Amesys en 2009.
Les Français lui auraient fourni un système d’interception des communications baptisé Eagle,
permettant même d’accéder aux e-mails. Ils n’étaient pas les seuls à
lorgner sur le marché libyen : des entreprises chinoise et sud-africaine
ont aussi apporté leur assistance technique à la dictature. En toute
discrétion.
Dans une des pièces, un panneau avertit d’ailleurs en anglais :
« Aidez-nous à garder nos activités classées “secret
défense” secrètes. Ne discutez pas d’informations “secret défense” en
dehors du QG. »
Le groupe Bull n’a pas souhaité s’expliquer. Les preuves dénichées
dans ce bâtiment ne sont pourtant qu’une demi-surprise. La semaine
dernière, un document publié par Mediapart révélait qu’en 2007, le
sulfureux Ziad Takieddine
avait servi d’intermédiaire entre le régime libyen et I2e, une
entreprise appartenant alors au même groupe qu’Amesys. Les deux sociétés
ont été absorbées par Bull en 2009. L’ancien patron d’Amesys, Philippe
Vannier, est depuis devenu PDG de Bull.
Sur son site, Amesys reste discret sur ses systèmes d’interception des données. Parmi les clients cités en références,
on retrouve les ministères français de la Défense et de l’Intérieur,
l’armée américaine, de grandes entreprises, mais évidemment aucun régime
dictatorial. Les pubs de l’entreprise n’évoquent évidemment pas, elles
non plus, ces débouchés peu recommandables.
Pas belle la vie ?....