Gaspard Delanuit écrit :
« Oui, le Bouddhisme Tibétain est dangereux : pour le régime dictatorial chinois et pour l’ego boursouflé des Occidentaux.
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A propos de »l’égo boursouflé des occidentaux« , j’ai commencé par faire une réponse politique, et je crois qu’il était important de la faire en premier : un étranger bénéficiant de notre hospitalité n’a pas à faire étalage des jugements négatifs qu’il peut porter sur tel ou tel de nos traits de caractère.
Je voudrais maintenant faire une réponse plus philosophique en soulignant que le bouddhisme n’a aucune vocation à dégonfler un quelconque égo.
Le bouddhisme, du moins le vrai bouddhisme tel qu’enseigné à l’origine, pense que nous n’avons pas d’existence propre, pas d’âme, donc pas d’égo. Nous somme un composé d’éléments en perpétuelle recomposition. C’est d’ailleurs bien le problème, car ces changements perpétuels sont aussi douloureux qu’inévitables.
L’égo n’existant pas, il n’est pas plus question de le dégonfler que de le détruire, mais simplement de changer notre regard.
Le bouddhisme a pour projet de sortir de la souffrance. Il n’est pas là pour nous humilier (nous »dégonfler l’égo« ) ou pour nous soumettre à tel ou tel pouvoir qui se chargera de nous apprendre que nous ne sommes rien (mais que le détendeur du pouvoir est tout ; bizarrement, le détenteur du pouvoir n’est jamais celui dont on se propose de »dégonfler l’égo").
C’est donc par une complète déformation du bouddhisme (par innocente politiquement) que certains le présentent comme une sorte d’hindouisme ou d’islam soufi, idéologies qui parlent de dissoudre le moi. Ah ! cet individu qu’on veut faire marcher au pas ! si l’on pouvait le convaincre de se dissoudre !
Il n’est pas question de dissoudre quiconque !
Si nous étions doté d’une personnalité permanente, tout irait probablement bien : elle serait stable, elle ne serait pas menacée par la maladie et la mort (qui l’une et l’autre sont des changements, donc des conséquences de notre caractère composé) et le Bouddha n’aurait pas eu besoin de chercher une voie de sortie de la souffrance.
Tout le problème vient de ce que nous N’AVONS PAS d’égo. Il n’est donc pas question de le dégonfler ni de le dissoudre.
C’est tout de même un comble de manipuler une philosophie libératrice, créée pour nous libérer de la souffrance, en instrument d’oppression.