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Commentaire de Sylvain Reboul

sur Et si nous n'étions que des théocraties travesties ?


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Sylvain Reboul Sylvain Reboul 16 mars 2006 11:05

Démocratie et théocratie sont en effet incompatibles et je reprendrais en les exposant d’une manière philosophique (logique) les éléments conceptuels qui soutendent votre analyse tout à fait pertinente, ce qui me permettra de formuler un désaccord concernant l’origine de la démocratie.

1) Il y a théocratie lorsqu’une religion prétend régir d’une manière hégémonique le vie politique et morale d’une société considérée, à tort ou à raison, comme une communauté idéologiquement homogène.

2) C’est pourquoi nos sociétés modernes ne sont plus, car elles ne peuvent plus l’être, théocratiques : elles sont en effet pluralistes et individualistes sur la plan religieux ou philosophique (qui comprend l’athéisme) et laïque dans leur fonctionnement politique

3) Toute religion est dogmatique en cela qu’elle se réclame d’un vérité absolue révélée qui est dans ses principes fondamentaux incompréhensible par la raison (la double nature du Christ, la virginité de la vierge, le résurrection, l’infaillibilité pontificale, la transsubstantiation etc...pour ne prendre que des mystères catholiques) ; on parle alors de mystères qui relèvent d’une expérience supra-rationnelle : l’expérience mystique (extase ou sortie hors de soi dans le rencontre avec l’absolu). Celle-ci ne vaut que pour les croyants à savoir ceux qui croient en la vérité des témoignages de ceux qui ont vécu cette expérience , à l’exclusion de ceux qui pensent que ce ne sont que des fantaisies de leur imagination délirante.

4) C’est pourquoi dans son principe la démocratie qui tente de faire reposer plus ou moins directement la décision du juste et de l’injuste sur le vote et l’élection dans un société pluraliste fondée sur la liberté de penser, y compris contre les croyances religieuses, est incompatible avec la théocratie. Pour la démocratie la vérité politique vient d’en bas, pour la théocratie, elle vient d’en haut (de Dieu)

5) Donc même si une religion est majoritaire dans un pays démocratique il serait antidémocratique qu’elle impose aux minorités des décisions politiques qui ne seraient justifiées que par des arguments de foi, mais non justifiables sur un plan rationnel dans la perspective d’un droit et d’une justice universelle (valant pour tous, donc y compris les non croyants ou les croyants d’autre religions). Car la démocratie ne réside pas seulement dans le pouvoir de la majorité, mais dans la décision majoritaire en tant qu’elle est susceptible de faire droit aux libertés fondamentales et à des règles libérales valent pour tous qui constituent les condition de possibilités du jeu démocratique et qui, en tant que telles, ne doivent pas être soumises à la loi majoritaire, sauf à renverser la constitution elle-même dans ses principes régulateurs fondamentaux. Une majorité peut renverser la démocratie, elle devient alors une tyrannie majoritaire.

Conclusion : Entre la théocratie, même et surtout majoritaire, et la démocratie aucun compromis n’est logiquement possible. C’est pourquoi je ne suis pas d’accord que l’on puisse dire, comme vous le faites, que la démocratie aurait une origine religieuse ; cela est, de plus ,démenti par l’histoire des rapports en Europe entre la politique et la religion : La lutte pour la laïcité a été partout une lutte contre la propention des religions dominantes à imposer leur loi au pouvoir temporel. Nos démocraties se sont donc batties aussi contre elles car celles-ci ont toutes, à tel ou tel moment de l’histoire, prétendu régir les sociétés humaines.

Le paradoxe de la laïcité

L’llusion politique

De la fiction démocratique à la réalité politique

Le rasoir philosophique


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