Bonjour Ocsena,
Effectivemment, la Terre a connu de grandes variations de climats. Cependant, je pense qu’il faille apporter plusieurs nuances, notamment d’un point de vue temporel, d’un point de vue géographique également, mais aussi d’un point de vue humain.
Commençons sientifiquement ! Les variations climatiques de grandes échelles peuvent être dûes à différents facteurs. Comme je l’ai expliqué précédemment, des facteurs astronomiques peuvent entrer en jeu. C’est le cas des cycles de Milankovitch par exemple, la rotation de la Terre autours du Soleil étant loin d’être ronde mais ressemblant plus à une danse folle, non perceptible toutefois à l’oeil humain (temporellement parlant, si vous préférez). C’est aussi le cas des météorites qui viennent s’écraser sur Terre, comme celle SUPPOSEE avoir former le cratère du Chixulub dans la Péninsule du Yucatan au Mexique. C’est une thèse en faveur de l’extinction des dinosaures à la fin du Crétacé (65 millions d’années), où les particules rocheuses seraient rentrées en gravitation autour de la Terre et auraient influencer de manière globale le climat terrestre. Ce point reste toutefois discutable, notamment dans son importance pour le changement climatique (Cf. un de mes postes précédents ainsi que la suite de la discution).
D’autres facteurs encore plus longs permettent d’expliquer les changements climatiques. C’est le cas par exemple de la tectonique des plaques. Les plaques tectoniques bougent lentement au cours des temps géologiques, si bien que des océans se créent ou se ferment. Ainsi, lors des prémices de l’ouverture de l’Atlantique dès la fin du Permien (environ 251 millions d’années), le climat terrestre s’est trouvé complètement changé du fait de la création de lacs et « mers intérieures » (à l’époque, l’Océan Atlantique n’était pas encore un océan en contact avec l’Océan Mondial mais correspondait à un système de rifts grossièrement similaire au Rift Est Africain). Plus tard, au Crétacé, le climat a été particulièrement bouleversé car (1) l’Océan Téthys se fermait doucement et formait les chaînes de montagnes alpines et (2) l’Océan Atlantique était relativement bien ouvert et ressemblait à un « vrai » océan. Plus tard encore, entre 55 et 45 millions d’années, l’Inde est entrée en collision avec l’Eurasie et les courants océaniques et atmosphériques se sont trouvés bouleversés du fait de la fermeture de l’Océan Téthys et de la formation de l’Himalaya. Ces processus de mouvements continentaux affectent le climat de manière lente mais à l’échelle mondiale.
C’est aussi le cas du volcanisme. A la fin du Crétacé, en Inde (région du Deccan), une activité volcanique sans précédent a eu lieu. Les éjectats gazeux ont pû modifier de manière relativement importante le climat terrestre, si bien que les dinosaures auraient pu disparaître en partie à cause de cela. Plus proche de nous dans le temps, l’éruption du Krakatoa (Indonésie) en 1883 a provoqué un changement dans la lumière solaire sur Terre, simplement parce que l’intensité lumineuse était différente en réponse à la diffusion par les gaz éjectés et les particules rocheuses en suspension dans l’atomosphère terrestre. Ce phénomène a été observé à l’oeil humain jusqu’en Europe, où des textes de l’époque relatent des levés et couchés de Soleil différents sur une période plus ou moins longue. Des études similaires, réalisées en temps réel sur l’Etna (Italie), le Pinatubo (Philippine) et autres ont abouti aux mêmes conclusions, en montrant que les éjectats gazeux et rocheux peuvent influencer de manière importante l’intensité de la lumière solaire, et par conséquent le climat terrestre de manière locale ou globale.
De même, la répétition des feux de forêt peuvent avoir des influences particulièrement importante sur le climat, les particules montant plus ou moins haut dans l’atmosphère et voyager sur de plus ou moins longues distances. Nous arrivons donc à une échelle beaucoup plus courte, mais qui, statistiquement, peut être extrêmement longue aussi. Certains scientifiques rapportent des feux de forêt particulièrement long au cours du Carbonifère par exemple, mais si on transcrit cela à l’échelle humaine, la durée d’un incendie durera tout au plus quelques mois. C’est en réalité la répétition qui a été déterminante à cette époque, et qui a pu aussi influencer plus ou moins localement le climat.
Sur une échelle de l’ordre de la centaine ou du millier d’années, nous pouvons aussi citer un autre exemple. Il y a plus de 7000 ans, la Mer Noire était un lac d’eau saumâtre, dans lequel beaucoup de fleuves européens venaient se jeter. Lors de la fonte de la calotte glaciaire, le niveau de la Mer Noire a monté de manière importante afin de rentrer en contact avec l’Océan Mondial via la Méditerranée et la Mer de Marmara. Aussi, la bassin de la Mer Noire a connu un changement drastique de ses conditions environnementales, en réponse à un changement climatique à l’échelle de l’Hémisphère Nord. De manière inverse, il est fort probable qu’il ait aussi connu un changement climatique à l’échelle locale, en réponse à son entrée en domaine marin. Il est cependant difficilement quantifiable en raison de l’intensité du changement environnemental lié à la mise en eau marine.
Un tel phénomène n’est cependant pas rare. Il a eu lieu au Miocène par exemple dans la région méditerranéenne. A cette époque, la Méditerranée connaissait un niveau plus bas qu’actuellement, peut-être de plusieurs centaines de mètres. C’est aussi le cas pour la Mer d’Aral aujourd’hui, où l’exploitation du coton notamment assèche le bassin depuis environ 50 ans, si bien que les lignes de rivage reculent et reculent. Les conditions climatiques à l’échelle du bassin se trouvent ainsi changées et accélèrent le phénomène.
Des écrits romains relatent aussi que le le Nord de l’Afrique (Sahara, Egypte, désert nubien et Maurétanie) correspondaient à l’Antiquité à un environnement de type savane africaine. Si cela n’a pas été le cas partout, c’est cependant une influence du réchauffement climatique.
Et enfin, sur une échelle de l’année, l’analyse des stalactytes montrent que le degré d’ensoileillement peut varier d’une année sur l’autre (ce qui n’est pas une grande découverte en soit, je vous l’accorde, mais qui reste un outil fabuleux et très puissant pour reconstruire le climat sur les derniers millénaires). Couplée à d’autres endroits du monde avec la dendrochronologie ou l’étude des carottes glaciaires, les scientifiques peuvent reconstruire le climat de manière relativement bonne, parfois sur une échelle de la décennie, parfois sur une échelle de l’année.
A ces changements écologiques correspond aussi une évolution des espèces vivantes. Certaines disparaissent, certaines se développent, et d’autres apparaissent. Cependant, l’évolution est très rarement figée mais prends souvent plusieurs centaines de milliers d’années, voire de millions d’années. Cette évolution est dite saltatoire, et elle est bien entendu dû directement à l’environnement, et donc au climat. Ainsi, l’Europe du Nord évoluait au Carbonifère sous un climat tropical voire équatorial, et était recouverte de forêts de type amazonien (avec les espèces de l’époque, bien entendu) ou correspondait à des environnements de type atoll calcaire (similaire par exemple aux Bahamas ou à la Polynésie)
Il est ainsi reconnu six grandes extinctions massives en géologie. En réalité, à chaque fin de période géologique correspond plus ou moins une extinction massive dont l’importance peut varier. C’est ainsi que les paléontologues ont commencé à construire le document de base que chaque géologue utilise aujourd’hui : l’échelle stratigraphique. La famille de cette bestiole A a commencé à vivre à cette époque et a fini de vivre à celle-ci, nous appelerons cela le Cénomanien ; cette bestiole B vivait à cette époque, nous appellerons cela le Lutécien. Etc, etc, etc...
Ces extinctions massives correspondent donc à des périodes bien déterminées et qui ont affecté la Terre de façon « universelle ». La cinquième extinction massive correspond par exemple à la disparition de dinosaures au Crétacé. Elle a été ressentie sur l’ensemble de la Terre et a mis environ 8 millions d’années à se terminer (depuis le début de l’extinction vraie jusqu’à la fin de l’extinction vraie). Cela ne veut pas dire que pendant le règne des dinosaures, des espèces n’aient pas disparu et d’autres apparu, au même titre que pendant la période d’extinction elle-même, des espèces n’aient pas apparu puis disparu.
Vous avez donc raison de faire le parallèle entre les variations climatiques et la disparition des espèces. Mais il faut aussi nuancer un peu ce qui arrive aujourd’hui, sans toutefois en amoindrir les effets.
Aujourd’hui, beaucoup de scientifiques (et je suis un de ceux-ci !) pensent que nous sommes dans la sixième extinction massive. Elle aurait commencé il y a au moins 10 000 ans, peut-être dès l’Holocène, peut-être légèrement avant avec la fin de la fonte de la calotte glaciaire. Cependant, il est bon de noter un point. Si nous pensons que notre époque PEUT ETRE associée à une sixième phase d’extinction massive, c’est aussi parce que nous sommes des observateurs de notre monde et que nous raisonnons - bien malgrès nous - dans et par un système anthropocentiste. Nous comparons donc l’Actuel avec le passé mais mettons aussi cela à notre échelle, sans s’empêcher de pratiquer le catastrophisme et de se plaindre.
L’espèce humaine a donc peut-être du mouron à se faire, certainement même, mais il faut aussi raisonner dans la (dé-)mesure de l’Homme. Si l’Homme s’inquiète aujourd’hui du climat, c’est bien parce qu’il est au centre de ce monde, l’observe et l’exploite. Et c’est surtout parce qu’il a peur pour lui même, et non pour le petit moineau qui volette autours de lui. Cependant, aujourd’hui, nombres d’espèces disparaissent, nombres d’espèces apparaissent, nombres d’espèces subsistent. Comme hier. Et l’Homme ne se porte pas si mal non plus avec une population grandissante... tout en continuant d’exploiter l’environnement et de se comporter comme si le monde était fait pour lui et pour aucune autre espèce.
Pour conclure définitivement... Il est trois choses à dinstinguer à mon sens. (1) Ce que la géologie nous a enseigné jusqu’à maintenant, à la fois sur le climat et sur le reste. (2) Ce que nous pouvons en faire, pour essayer de sortir d’une situation que nous savons bien mauvaise. Dire le contraire est assûrément mentir ! (3) Pourquoi, pour quoi et pour qui agissons-nous ?
Quand cela finira-t-il ? Les questions restent donc ouvertes.
Cordialement, Cédric
PS. : sans trop de rapport. Merci pour le lien du site que vous avez fait suivre, je suis allé surfé un peu dessus et y ait trouvé des choses interessantes. Et décidément je ne suis pas en accord aucun avec ce que le journaliste dit sur l’Affaire Pascal Sevran !
14/06 15:44 - GLM
Pour mieux comprendre le lien entre les tâches solaires et le réchauffement, aller voir : (...)
19/09 17:48 - Jean Vladimir
Peu importe. L’énergie atomique inoffensive et inépuisable, page 8 du site (...)
12/03 13:35 - GHJGJ
31/01 12:17 - Abraham
Ingénieur et physicien,le sujet m’intéresse, même si, au départ, je n’y connais pas (...)
29/01 19:13 - js
la dénonciation de l’instrumentalisation de l’écologie http://www.quebecoislibre.org/020
22/01 17:46 - Frédéric
Un article intéressant du Professeur Nigel Weiss intitulé : Le soleil va-t-il nous refroidir ? (...)
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