Depuis que l’on a supprimé le suffrage censitaire, payer des impôts (ou non) ne donne (ni n’enlève) aucun droit de vote. Par ailleurs il est déplacé d’invoquer une exigence d’égalité entre étrangers U.E et étrangers hors U.E.
Ce vote des ressortissants d’ États hors U. E. ne serait une mesure de justice que si les distinctions Français / citoyens de l’Union Européenne / étrangers n’étaient pas fondées en droit. Ces étrangers, votant déjà, s’ils le souhaitent, dans les consulats, par correspondance ou par procuration dans leur pays (comme viennent de le faire les Tunisiens de France et comme les Français de l’étranger), auraient, si cette disposition était adoptée, double poids ; ainsi certains seraient plus égaux que d’autres, ce qui est hélas déjà le cas avec les doubles, voire triples nationalités dont notre époque égalitariste s’accommode curieusement. S’il y a une justice à établir, c’est la suppression de la reconnaissance de ces doubles et triples nationalités et non leur généralisation de fait à tous les étrangers présents sur le territoire.
Il y aurait injustice aussi par rapport aux nombreuses personnes qui ont véritablement et sincèrement souhaité acquérir la nationalité française depuis les années 1960 pour participer à la vie nationale et aux choix engageant l’avenir de notre nation, notamment les Harkis d’Algérie.
Ce vote des résidents étrangers irait encore à l’encontre de la cohérence de la construction de l’Union européenne, puisque actuellement les citoyens de l’U. E. ont, par la vertu juridique du traité de Maastricht dans son article 8 B, et sous réserve de réciprocité, droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales et aux élections européennes.
Comment pourrait-on justifier aux yeux des Français auxquels on a fait approuver par référendum le traité de Maastricht de 1992, que cette exigence de réciprocité, légitimement exprimée pour les ressortissants des quinze États alors membres de l’U. E., peut être abandonnée, sans autre forme de procès, dans le cas d’immigrés hors U. E., et en majorité ressortissants de nombreux États non-européens ?
Le vote des étrangers est contraire à la Constitution. Certes, une Constitution, cela peut se réviser, encore faut-il avoir de bonnes raisons pour cela. L’article 3 alinéa 3 qui dispose « Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques » fait partie du titre Ier, « De la souveraineté ». Le vote étranger, ce serait la fin de la souveraineté.
Cette souveraineté est déjà affectée par la citoyenneté européenne ; mais au moins a-t-elle un fondement juridique (les traités) – et le vote des ressortissants de l’U. E. une exigence de réciprocité. Deux éléments dont la proposition socialiste de mai 2000 de vote des étrangers tous azimuths aux municipales est entièrement dépourvue.