Vous posez une très bonne question. Vous pouvez d’abord remarquer que le monde a connu récemment un certain nombre de révolutions non violentes ou peu violentes. Je ne pense pas aux révolutions arabes, si ce n’est à la révolution de Jasmin, mais à certaines de celles qui ont suivi la chute du mur, à la chute du mur elle-même, à la révolution Orange, etc. Une révolution est donc possible sans effusion de sang. Révolution veut dire « retournement complet », et non je ne sais quelle destruction d’une partie de l’humanité par l’autre. Par ailleurs, il va de soi que « Communistes » est un parti qui attend activement d’être rejoint par l’Histoire. Cette jonction ne se produira peut-être jamais. Mais il est possible aussi que les peuples finissent par comprendre qu’ils sont sous le joug d’un totalitarisme libéral (un oxymore si vous voulez, mais non pas une contradiction) qui demande lui aussi à être radicalement mis à bas. Les prémices d’un tel mouvement ont peut-être déjà commencé à se manifester aux USA à travers un phénomène qui inquiète les milieux capitalistes : à savoir que la reprise économique ne s’accompagne pas d’une reprise de la consommation ; comme si à travers la crise les Américains commençaient à se dégoûter du consumérisme. Pourquoi la révolution dans les ex-satellites de l’URSS s’est-elle en général déroulée en douceur ? Parce qu’il était devenu clair pour la plus grande majorité comme au fond pour la minorité que l’Histoire était consommée. Voyez l’histoire de l’effondrement du mur. La vraie révolution, disait Kant, se produit d’abord dans la manière de penser. Toute autre qui ne commencerait pas par là ne pourrait que reproduire les anciens préjugés bientôt suivis de leur cortège de servitudes et de misères.