Et oui, hélas ! Sans oublier la généralisation des « petits derniers », les sondages « rolling » en continu qui changent une fois par jour un tiers du « panel ».
Les sondages ont été adoptés après que Gallup a prévu avec précision l’élection de Roosevelt contre Hoover en 1932. Cependant, la justification théorique de la fiabilité des sondages a été conçue bien plus tard, dans les années 1960. Et le pouvoir de prescription desdits sondages a été purement et simplement « oublié » dans cette grande et belle théorie de sociologie approximative.
Avec les « rolling », c’est la même : comme en 2007 ça a donné un résultat très proche du résultat final, et sans qu’on s’interroge sur le fait que ça serait peut-être tout simplement parce que le résultat de ce sondage quotidien a servi de « boussole » à tous les autres sondages publiés et promus (qui ont aligné leurs chiffres sur ceux fournis par ce « rolling »), que d’une manière générale les instituts tâchent de se copier les uns les autres afin de retranscrire (à une semaine d’écart) les mêmes « tendances ».
La convergence (toute fabriquée) des sondages participerait de la crédibilité de la technique sondagière (la théorie des sondages prétend que tous les sondages effectués suivant une méthodologie reconnue sont cohérents entre eux) alors qu’elle est la conséquence de cette crédibilité aux yeux des commentateurs de l’opinion (journalistes, experts, politistes... et sondologues !).
Mais on ne peut pas se débarrasser purement et simplement des sondages électoraux. Ils sont rentrés dans les mœurs de la vie publique, hélas. Un gouvernement qui aurait ce courage de salubrité publique serait aussitôt accusé d’atteinte aux libertés publiques.
En revanche, on peut considérablement affaiblir le pouvoir de prescription des sondages, ainsi que la place qu’ils occupent dans le commentaire politique.
Il faudrait des lois instituant :
- l’obligation de publier simultanément et dans le même document les données brutes et les données redressées des sondages électoraux
- l’interdiction de publication des sondages électoraux sur un scrutin moins d’un mois avant que ledit scrutin n’ai lieu
- l’obligation de publier au JO toute méthodologie de redressement des données utilisée dans un sondage électoral
- l’obligation pour les détenteurs de cartes de presse, quand ils commentent des sondages électoraux, de commenter tous les sondages électoraux publiés sur le scrutin considéré sur une période de deux semaines avant la date de publication du sondage commenté le plus récent
Ce ne serait pas parfait, mais cela devrait mécaniquement réduire considérablement la place des sondages dans le commentaire des élections.