C’est encore une conception erronnée. Ils avaient la possibilité de voyager. Seulement, comme tout passait par une bureaucratie tentaculaire, il fallait effectuer des démarches souvent épuisantes. Mais les voyages scolaires des deux côtés du rideau de fer furent, à l’époque, assez fréquents.
On a aussi tenté de faire passer leurs fameux « passeports intérieurs » comme une forme d’emprisonnement des gens dans leur ville, alors que c’était une mesure tout à fait logique : comme c’était à l’Etat de fournir les logements des gens, il fallait bien pouvoir planifier qui allait s’installer où, afin de leur trouver leur nouveau logement, leur nouvel emploi et inscription sur les listes locales. La volonté excessive de planification du système soviétique s’explique si on considère que tout ce qui nous paraît ici relever de l’ordre de l’initiative individuelle relevait là-bas du devoir de l’Etat.
Le tourisme dans les pays de l’Union était très fréquent : on allait prendre ses vacances en Géorgie ou aux bords de la Caspienne comme ici on va à Biarritz ou sur la côte d’Azur. Par contre, pour ce qui était de sortir du territoire de l’Union, il fallait justifier d’une raison. Et vu le contexte de compétition militaire et la grande paranoïa des deux blocs quant aux affaires d’espionnage, il était fréquent en effet que les visas de sortie du territoire soient refusés.
Mais voyez, vous dites que si les gens de là-bas se croyaient heureux, c’est parce qu’ils ne connaissaient pas notre société et donc ne pouvaient pas comparer. Seulement, nous n’en connaissions à l’époque pas davantage de leur société qu’eux n’en connaissaient de la nôtre, qu’à travers des contemptions de bon ton. On décrivait là-bas l’Occident comme le pays de l’exploitation des pauvres par les riches ; et on décrivait ici l’Union Soviétique comme une dictature totalitaire qui envoyait les gens en Sibérie pour un mot de travers, ce qui était passablement exagéré.
Ayez la curiosité d’en découvrir davantage sur l’Union Soviétique, ce n’était certes pas un pays de Cocagne, mais c’était loin d’être la dictature abominable où règnait la peur qu’on nous a prescrit de croire. Je soutiens que des millions de Soviétiques ont vécu heureux au sein de l’Union. Il y a une grande nostalgie de cette époque, une nostalgie majoritaire, révélée par les sondages. C’est aussi ce qui explique que les Russes ont voté massivement pour l’autoritarisme patriotique de Vladimir Poutine, car il incarne, à leurs yeux, une survivance de la toute-puissance bienveillante de l’Etat.
Ils ont connu Staline et ils n’en sont pas morts ; pour l’immense majoité d’entre eux, et cela va peut-être vous choquer mais on ne peut rien faire d’autre que l’accepter, leur avis sur la personne de Staline est positif, et qu’il fut un grand homme. D’ailleurs, quand le gouvernement géorgien pro-américain s’est entrepris de déboulonner les statues de l’illustre géorgien dans les années 2000, il fallait voir la réaction des locaux, ils n’ont toujours pas digéré cet épisode.
On remarque enfin que quand le système soviétique s’est effondré, il n’a fallu que quelques années au peuple, sous l’ère Eltsine, pour comprendre la vraie nature du système des vainqueurs. Et croyez-moi, notre libéralisme, ils en sont maintenant vaccinés à tout jamais.
Encore une fois, le système soviétique avait des défauts qui le condamnaient à terme. Ce n’était pas un pays de cocagne. Mais c’était loin, très loin d’être la dictature horrible qu’on nous enseigne encore aujourd’hui.
Lisez par exemple l’imposante biographie du jeune Staline par l’historien anglais Simon Sebag Montefiore ; vous verrez que même le Goulag n’était pas ce que vous croyez. On s’imagine un camp avec des barbelés, des miradors et des baraquements, dans le style de Sobibor ou Treblinka. Ca n’avait, mais alors rien à voir. Dans la majorité des cas on envoyait les gens en Sibérie dans un village perdu, loger chez l’habitant, sous la surveillance de l’unique gendarme du coin, et ils servaient d’employé communal. Parfois, les prisonniers servaient à des travaux d’envergure controversés, comme le forage d’une mine ou la pose des rails du Transsibérien ; mais à la différence des camps nazis, l’immense majorité des gens qui étaient envoyés au Goulag en revenaient.
Il n’y a pas de système parfait, et le système soviétique ne l’était certainement pas. Mais avant de le condamner, il faut le connaître.
22/10 21:12 - Simple citoyenne
Carthoris, tout ça est bien loin dans le fond et ce n’est pas si important après tout (...)
22/10 20:25 - Simple citoyenne
Carthoris bonjour, tu as repris le site d’ADS ? il y a un post qui date d’Avril (...)
06/04 11:16 - scripta manent
Bravo. Mais il ne nous faut pas un Président commun à la Commission et au Conseil, il faut en (...)
06/04 11:08 - scripta manent
Bravo ! Quand à ceux qui prétendent avec des trémolos dans la voix que la France éternelle va (...)
04/04 19:55 - cliquet
Et oui, c’est dur de se dire qu’on s’est fait rouler dans la farine pendant (...)
04/04 19:26 - cliquet
Surtout qu’une des premières conséquences de l’effondrement soviètique fut le (...)
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