Un journaliste du Québec attaque dans un quotidien un syndicaliste et ses méthodes de fier-à-bras. Cet article est appuyé sur des faits probants. Le même journaliste est également l’auteur d’un blog hébergé par son journal. Cette fois, il attaque en termes peu équivoques le même syndicaliste, le traitant de menteur, notamment. Le syndicaliste a porté plainte au Conseil du presse du Québec pour manquement à l’éthique professionnelle. Le Conseil n’a retenu aucun grief contre le journaliste. Toutefois, le Conseil s’est interrogé sur l’ambiguité des deux traitements donnés à une même information : dans la presse écrite et sur un blog. Je joins ces interrogations qui traduisent fort bien, à mon avis, les limites fragiles à ne pas franchir pour un journaliste :
le comité des plaintes et de l’éthique de l’information a considéré que la véritable question est de savoir s’il est conforme à l’éthique qu’un journaliste puisse couvrir un événement, traiter le sujet en rapportant dans son journal les comportements d’une personne et, en même temps, interpeller cette personne sur une autre tribune publique - quelle que soit cette tribune - pour se moquer d’elle, la provoquer et la ridiculiser ? Deux principes - énoncés dans le guide Droits et responsabilités de la presse - peuvent aider à clarifier la meilleure conduite à tenir dans des circonstances analogues. Le premier veut que pour préserver leur crédibilité professionnelle, les journalistes soient tenus à un devoir de réserve quant à leur implication personnelle dans diverses sphères d’activités sociales, politiques ou autres qui pourrait interférer avec leurs obligations de neutralité et d’indépendance et leur crédibilité. L’autre principe veut que le droit de réponse des journalistes aux commentaires des lecteurs, doit être exercé avec discernement et dans le plein respect des personnes. Les journalistes ne doivent pas se prévaloir de ce droit pour dénigrer, insulter ou discréditer les lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. Pour ces raisons, le Conseil a retenu le grief sur cet aspect du devoir de réserve. Même si le journalisme d’opinion et le journalisme d’information sont deux formes de pratique professionnelle qui reviennent de droit au journaliste, ce dernier peut difficilement, selon le Conseil, passer librement d’un genre journalistique ou d’une tribune à l’autre sur un même sujet sans risquer de porter atteinte à sa crédibilité professionnelle et à la validité de son information. Par conséquent, le Conseil incite fortement les mis-en-cause à éviter à l’avenir de telles affectations journalistiques.