« Bon Français, mauvais Français »
Cela suppose qu’il y ait des Français.
Pour ceux qui sont nationalistes, être Français va de soi et n’implique aucune ambigüité.
Pour ceux qui disent ne pas l’être, se dire Français représente une ambigüité.
Laissons l’époque présente et revenons vers 1880.
A l’époque, à part quelques rares tenants d’Erasme, et encore, chacun se disait Français sans ambiguïté, de Jules Ferry à Clemenceau et cela sans qu’il ait été question de nationalisme.
Disons que le nationalisme de cette époque post Sedan allait de soi pour ceux qui avaient des attaches ou qui vivaient dans ce qui restait de la France (Y compris peut-être en Alsace-Lorraine pour certains).
Ce nationalisme qui ne disait pas son nom se fondait sur une première évidence qui ne tourmentait personne : les Européens constituaient la plus parfaite des races (Cf « Le tour de France de deux enfants », vendu à 8,5 millions d’exemplaires et qui a été dans nos pupitres d’école jusqu’en 1977).
C’est qu’à part quelques excités du genre Wilberforce ou Schoelcher, il n’y avait pas grand monde pour contester ce premier dogme installé depuis 1500.
Nonobstant nos querelles avec nos voisins, jusqu’en 1958, nous visitions les mêmes zoos humains où s’affirmait cette vérité universelle, incontestable de notre supériorité physique esthétique et morale.
Ce n’est qu’accessoirement et parce qu’il a constamment fallu guerroyer avec nos voisins pour nous partager le gâteau du colonialisme que nous avons eu des ennemis européens transformés en diables par tout un système de transcendances démonisantes.
Allemands et Français rivalisaient d’insultes mutuelles en augmentant l’autrisme, le différencisme à partir du dogme premier, le racisme.
C’est le racisme, cette vision de l’autre classé inférieur (physiquement et moralement) qui, ouvrant un principe, a permis aux Allemands et aux Français de caricaturer leurs minimes écarts physiques et culturels pour se diaboliser mutuellement.
(Il nous a été très difficile d’admettre que si nous nous sommes lancés à fond dans la scolarisation en 1882, c’était parce que nous avions constaté que les Prussiens victorieux étaient plus instruits déjà en 1871)
Les focalisations et amplifications de nos différences entre voisins européens versaient dans le genre « Pouahhh, ils ne mangent que des saucisses » ; « Pouah, ils aiment l’ail » ; « Pouah, ils aiment la corrida »
« Nous les Français, on ne fait pas ces horreurs que font les Allemands »
« Nous les Allemands, on ne fait pas ces horreurs que font les Français »
C’étaient les Etats rivaux et rancuniers qui nourrissaient, attisaient et argumentaient constamment ces haines.
Les Etats ayant la Parole et la Force avec eux, ils imposaient explicitement et implicitement à leur peuple le concept nationaliste. Dire qu’on était citoyen du Monde n’avait aucun sens à cette époque. On devait se dire Français ou Allemand, pas « Je m’en fiche de ma nationalité » car c’était assimilé à de l’anarchisme et ça valait les pires ennuis.
Ce nationalisme qui n’avait même pas besoin de dire son nom puisqu’il suffisait que chacun se dise Français ici, Allemand là, a abouti aux délires que nous connaissons désormais très bien.
Comme tous les excès, ça s’est terminé en ouroboros car nous nous sommes infiniment plus entretués que nous n’avons tués d’esclaves ou de chiens.
(idem pour la guerre de Sécession où plein de Blancs sont morts et peu de Noirs)
Le divisisme de base qu’était le racisme, nous l’avons cultivé à outrance en le pratiquant à tous les niveaux. Certes entre nations par le biais de l’identité nationale et des frontières nationales mais aussi entre nous, Français. Vu depuis Mars, il a pu paraître dément de constater que des gens vivant en RP, se massacraient, les uns parce qu’ils se disaient Versaillais, les autres parce qu’ils se disaient communards.
L’autrisme à outrance nous l’avons pratiqué en partant du racisme qui était, pour sa part, peu contesté à part quelques Ho Chi Minh ou Omar El Mokhtar égarés.
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Maintenant que le racisme, l’infériorisation de ceux qui sont différents par leur couleur de peau ou la forme de leurs narines, arrive à sa fin, c’est tout le bazar qu’il entraînait à sa suite qui doit être reconsidéré.
Sans le soutien fondamental du racisme, comment persister à dire qu’un mangeur de chorizo est supérieur à un mangeur de choucroute ?
Chaque fois qu’on dit ou qualifie quoi que ce soit en différence, surtout avec une connotation négative, on se retrouve obligé de prendre appui sur le racisme. Or il ne tient plus. On est donc mal sur mille tableaux de classification.
Et l’identité nationale, la bête identité à laquelle personne ne fait trop attention dans sa vie courante, se retrouve, comme tous les autres critères différencistes, en position délicate.
Bien ou mal je n’en sais rien. Mais il est impossible que le racisme d’allure physique parte à la poubelle sans que le concept de Français n’y aille également à terme.
L’abandon du drapeau n’est certes pas pour demain, mais dans mille ans, il n’y en aura plus.
Il faut du temps pour opérer notre transition entre cette période de 4 siècles de convictions racistes indiscutables et la période future qui ne verra plus la moindre possibilité de péjorer des gens autrement qu’à titre strictement individuel.
Dans le grand futur, seuls les individus seront insultés, pour ce qu’ils feront ou ne feront pas, pas les groupes artificiels car il n’y en aura plus.
Internet représente un espace nouveau qui est né justement à la fin du racisme colombien. Bien qu’on puisse y trouver des familles, des groupes, sa tendance majeure est au mélange. La Toile tend à être sans frontières, c’est du moins ainsi que l’entendent la très grande majorité des gens qui l’utilisent et la font (seuls les Etats cherchent à y construire des murs). L’adifférencisme de la Toile préfigure l’adifférencisme concret du millénaire qui s’ouvre.
C’est la raison pour laquelle les nationalismes d’aujourd’hui, pour autant qu’ils persistent à croire au racisme, sont dans une position moins ambigue que celle de ceux qui disent ne pas être racistes tout affirmant être Français.
Tant qu’on se chamaille sur « Bon » et sur « mauvais » on ne pense pas à examiner « Français » ; « Français » semble aller encore de soi alors qu’il est en sursis.
15/05 16:59 - ddacoudre
bonjour toor difficile de te répondre simplement, nous ne choisissons pas notre naissance et (...)
15/05 13:02 - toor
Bonjour ddacoudre, pour répondre à ton commentaire peux-tu me dire quel drapeau n’a-t-il (...)
14/05 12:48 - ddacoudre
bonjour toor je n’y vois pas d’inconvénient que le drapeau soit tricolore, pourvu (...)
14/05 09:58 - jaja
Le premier mai est la journée internationale des travailleurs qui ont pour couleur de drapeaux (...)
14/05 09:38 - toor
Le drapeau tricolore est tombé dans un pot de peinture verte mais ce n’est pas (...)
13/05 18:44 - ddacoudre
bonjour easy merci pour ce long commentaire sur l’évolution du racisme à partir de nos (...)
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