Bonjour Mr Asselineau.
Vous parler de « divorce entre les français et la classe politique ». C’est une façon de voir les choses. Mais peut-être que le désintérêt des français pour ces législatives traduit un malaise bien plus profond. Plus encore qu’une défiance envers la classe politique, je ressens un dégoût vis-à-vis du système. Les français (et ils ne sont pas les seuls en Europe) sentent que quelque chose cloche. Beaucoup ne savent pas quoi, c’est comme une écharde dans leur esprit. Ils n’y croient plus. Et comment le pourraient-ils ? Une tromperie, un stratagème, peut fonctionner un certain temps, mais à force, le subterfuge finit par devenir évident.
Si la plupart n’a pas encore mis le doit sur la cause de ce malaise, d’autres, de plus en plus nombreux, ont cherché et ils ont trouvé la cause du malaise. Oh, certes, je vous l’accorde, beaucoup font la sourde oreille et ne veulent rien entendre (et peut-être faites-vous partie du lot). Mais je crois qu’à un moment donné, il faudra bien tendre l’oreille. Les personnes intelligentes ne peuvent pas rester éternellement dans le déni.
L’écharde que j’ai évoqué est assez simple à énoncer : le système politique français, comme la plupart des systèmes des pays dit « démocratiques », ne sont pas des démocraties, mais bien des gouvernements (prétendument) représentatifs. Et la tromperie a justement été de faire appeler ces systèmes des démocratie, alors qu’un gouvernement (prétendument) représentatif, fondé sur le suffrage électif, est le strict contraire de la démocratie.
Selon Rousseau, il y a une immense distance entre un peuple libre se donnant à lui-même ses lois et un peuple désignant des représentants pour écrire des lois à leur place. Madison ne considérait pas la représentation comme une approximation du gouvernement par le peuple, mais au contraire un système politique substantiellement différent et supérieur. Sieyès soulignait avec insistance la différence énorme entre la démocratie où les citoyens font eux-mêmes la loi et le régime représentatif dans lequel ils cèdent leur pouvoir à des représentants élus.
Pour Sieyès en France, comme pour Madison au Etats-Unis, le gouvernement représentatif n’était pas une modalité de la démocratie, c’était une forme de gouvernement essentiellement différente et préférable.
Mais préférable pour qui ? Selon eux, préférable pour tous, car ils s’estimaient eux-mêmes supérieurs en qualités et en intelligence, autant sans doute qu’en vertus, et donc seuls à même de gérer les affaires publiques. Ils ne voulaient donc en aucun cas d’une démocratie, et cela de façon ouverte et non dissimulée. Ce n’est que par la suite que les systèmes républicains auxquels ils ont participer à l’élaboration et l’instauration ont volé le nom de démocratie.
Toujours est-il qu’après 200 ans de ces régimes, ont peut sans difficulté voir qu’ils ne sont pas - et de loin ! - préférable pour les peuples. Ils ne servent pas l’intérêt public, mais servent avant tout des intérêts privés, ceux des plus riches, et en particulier ceux des banquiers et des riches industriels. Ceux-là, qui possèdent déjà tout le pouvoir que procure la richesse financière, ont également volé le pouvoir de création monétaire (cela, au moins, vous n’en disconviendrez pas), non sans la complicité de traitres (je pèse mes mots) arrivés au pouvoir par ... les élections. A présent, avec la dictature des institutions européennes, ils ont donc tous les pouvoirs.
Cela, les français (et d’autres en Europe) l’ont compris. Ils ont compris que c’est l’Europe qui dicte la politique aux états, et que la classe politique - de quelque parti que ce soit - n’est plus qu’une ribambelle d’exécutants qui d’une manière ou d’une autre, les trahis ou les trahira et, dans le meilleur des cas, sera impuissante à résister au politburo de l’axe Bruxelles-Strasbourg.
Aristote a écrit "Je veux dire qu’il est considéré comme démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort et comme oligarchique qu’elles soient électives (...)".
Il semble que la solution à l’impuissance politique chronique des peuples (dont vous-mêmes êtes une victime en dépit de votre expérience politique) réside dans ce qui caractérise une démocratie : le tirage au sort, appuyé par une série de mesures dont les athéniens ont déjà montré l’efficacité., comme la rotation des charges (mandats courts et non renouvelables), la reddition des comptes (mandats impératifs), le referendum d’initiative citoyenne (RIC) et, surtout, le maintient exclusif du pouvoir décisionnel entre les seuls mains de l’assemblée du peuple.
Pour parvenir à cela, ce qu’il faut, c’est une nouvelle constituante citoyenne. Et il est impératif que cette constituante ne soit en aucun cas élue, sans quoi : mêmes causes, mêmes effets. Ce n’est pas aux gens de pouvoir d’écrire les règles qui doivent les empêcher d’abuser du pouvoir.
C’est là la cause fondamentale de tout le problème de l’impuissance des peuple : l’évident conflit d’intérêt lorsque ce sont les hommes qui se destinent ou qui sont au pouvoir qui rédigent la constitution, censée protéger les peuples contre les abus de pouvoir. De la même façon qu’un juge est récusé lorsqu’il a un intérêt pour l’une des partie à un procès, il faut récuser toute personne se destinant à l’un quelconque des postes de pouvoir. Il faut donc un Assemblée Constituante tirée au sort parmi le peuple.
Je vous invite donc à lire l’excellent ouvrage de Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif.
Cordialement,
Morpheus
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