Alinea,
Si vous voulez qu’on retourne à la nature, il ne faut pas seulement renoncer à la maîtrise de la douleur en médecine (qui est quand même un des progrès inappréciables du siècle passé), il faut renoncer tout bonnement à la médecine, à la contraception, à toutes les techniques, et vouloir retrouver l’état de nature décrit par Rousseau dans le « Discours sur l’inégalité », où chacun se suffisait à lui-même, n’ayant pas besoin de l’industrie des autres. Les hommes, alors, vivaient « bons et heureux », croit-il. Sauf évidemment quand ils avaient une rage de dent, une péritonite, ou quand les femmes crevaient misérablement des fièvres puerpérales. Vous me direz qu’à l’époque de Jean-Jacques, on n’était guère plus avancé qu’au néolithique, mais enfin nous n’en sommes plus là et vous pouvez exprimer toutes les nostalgies paradoxales que vous voudrez, touchant à des époques où, fort heureusement pour vous, vous n’avez jamais vécu, vous n’empêcherez pas les progrès qu’impose l’exigence rationnelle. Encore trente ans et je vous assure qu’on ne parlera plus guère de la différence des sexes, sauf lorsqu’il s’agira des divertissements érotiques dont on aura complètement oublié (on y est presque), qu’ils avaient pu avoir, dans un lointain passé, un rapport avec la fonction de reproduction de l’espèce.