Il ne faut pas confondre plusieurs notions :
L’argent sale : L’argent sale est celui qui provient des différents trafics et activités illégales. Contrairement à ce qu’affirment nos « vertueux », il ne fait QUE transiter par les paradis fiscaux. Leur transit sert en fait à rompre la chaîne et à empêcher le traçage des fonds avant qu’ils ne soient ré-investis. Si tout le monde est d’accord pour proclamer haut et fort que la drogue, la prostitution, la contrefaçon, le trafic d’armes, les enlèvements, le jeu, l’émigration clandestine sont de vilaines activités qu’il faut combattre, il n’en est pas moins vrai que les mêmes pays sont tout contents quand, une fois blanchis, ces capitaux servent à construire des hôtels, des programmes immobiliers, des clubs de foot, renflouent des banques ou paient des campagnes électorales. L’argent sale est donc le prétexte consensuel que l’on (le G20 par exemple) va évoquer pour prendre des mesures, tout en s’assurant qu’elles ne perturbent pas vraiment le recyclage.
Le fraudeur. Le fraudeur, c’est celui qui profite des avantages d’un système ou d’un pays et qui contrevient de manière illégale aux règles fiscales en vigueur dans le pays en question. Contrairement à ce que qu’affirment les « vertueux » qui hurlent contre les « paradis » fiscaux, les fraudeurs ne les utilisent que très rarement, pour la bonne raison que les fraudeurs ne fraudent généralement pas, individuellement, des montants suffisants pour que le transit via des paradis fiscaux (tout de même onéreux) ne soit rentable. Qui plus est, le fraudeur se contente en règle générale de ne pas payer ou de se mettre en situation de ne pas payer, ce qui n’est pas générateur de cash à cacher ! Les fraudes qui sont les plus fréquentes, c’est l’employeur qui ne paie pas ses charges, les fausses factures qui permettent de faire prendre en charge des dépenses non affectées, et, surtout, le travail au noir (environ 20% de l’activité en France) qui permet à l’employeur (souvent particulier) de ne pas payer de charges et au travailleur de ne pas déclarer cette part de revenus. En volume, c’est ce poste qui est le plus lourd pour un pays comme la France. Rien à voir avec les paradis fiscaux...
Le montage financier : Il s’agit de créer des sociétés de droit étranger au pays dans lequel se déroule l’activité principale. Lorsque cette société n’a aucune activité dans le pays où elle est domiciliée, on l’appelle « offshore ». Certains pays accordent un statut spécial aux sociétés « offshore ». Notamment un statut fiscal particulier. Partant du principe que la création d’une société n’ayant aucune activité n’engendre aucun coût pour la collectivité, ces pays leur accordent un régime fiscal allégé, tout ce qui est versé étant 100% bénéfice pour l’Etat. Très souvent (mais pas toujours, il ne faut pas généraliser) ce statut s’accompagne d’un anonymat des actionnaires de la dite société. C’est ceci qui est le plus utilisé car il permet légalement de réduire son imposition. Soit en transférant le siège de ma société dans un pays dont le régime fiscal est plus intéressant (c’est le cas de tous ceux qui domicilient leur entreprise aux Pays Bas (L’Oréal par exemple), en Grande Bretagne, en Irlande, en Lituanie...) soit en créant une société holding vers laquelle je fais remonter mes bénéfices (au Luxembourg par exemple). Les sociétés « offshore » ne vont servir en général qu’à des opérations ponctuelles sur lesquelles l’anonymat est requit (Crédit Lyonnais pour truander Tapie sur le rachat d’Adidas, Dassault pour payer des commissions aux acheteurs, Airbus pour les mêmes raisons, Thomson, Total etc...) ou pour gérer des activités internationales s’étendant sur plusieurs pays ou plusieurs continents, pouvant donc être domiciliées n’importe où et donc, a fortiori chez le moins disant fiscal. Notons que le réseau commercial qui achète ses produits en Chine via une offshore qui les revend à chacun de ses points de vente qui sont des entités indépendantes (des franchisés ou assimilés) est dans la légalité. Ce sont ces montages financiers qui énervent les Etats. D’un côté, ils ne peuvent pas les interdire, les utilisant eux même pour leur politique de vente d’armes ou de financements de guérillas (comme en ce moment en Syrie où les djihadistes sont armés, transportés et payés par des fonds saoudiens, qataris et occidentaux transitant par des sociétés offshores) et d’un autre jugent inacceptable que des privés, individus ou sociétés, puissent en profiter. Lorsqu’ils vous annoncent des « milliards » de fraude fiscale cachés dans les paradis fiscaux, c’est à cela qu’ils font allusion. Lorsqu’ils vous parlent de combattre l’anonymat des sociétés offshore ou des comptes bancaires, c’est la recherche de l’optimisation fiscale qu’il évoquent et qu’ils qualifient de « fraude », par la lutte contre la vraie fraude ni la lutte contre la délinquance.
Cette tendance à vouloir criminaliser l’optimisation fiscale est intéressante à plus d’un titre. Tout d’abord elle est révélatrice d’un concept par lui même contestable. celui « d’appartenance ». Au nom de quoi, l’argent gagné par une personne morale ou physique « appartient » il à l’Etat auquel est rattachée cette personne ? Nous touchons la notion de servitude, c’est à dire d’appartenance d’un individu au maître de la terre à laquelle il est rattaché.
Ensuite elle touche à la notion de choix, d’intérêt et de liberté. Dès lors que je suis dans le cadre légal, pourquoi vouloir m’interdire la liberté de mes choix ? Pourquoi si je suis citoyen français vouloir m’interdire de créer une société en Irlande ?
Donc, il ne faut pas tout confondre et les milliards qui se trouvent dans les « paradis » fiscaux ne proviennent pas tous, loin s’en faut, de la « fraude fiscale » qui, elle, est bel et bien présente en France et dont les fonds restent en France.
L’anonymat des sociétés, qui peut être une vraie question, n’est pas prêt de disparaître car il s’agit d’un outil indispensable à toutes les grandes société et à tous les Etats pour mener leurs politiques et assumer la corruption sans laquelle aucun grosse affaire ne peut se réaliser.
Le citoyen qui va créer une société offshore qui va faire ses achats et sur laquelle il va laisser ses bénéfices pour ne pas en voir plus de la moitié piquée par l’Etat arrêtera le jour où il sera plus rentable et plus intéressant pour lui de ne plus le faire. Autrement dit, trop d’impôt tue l’impôt..
Chaque pays est libre de créer le régime fiscal de son choix. Vouloir interdire à certains d’opter pour un régime fiscal avantageux envers des étrangers qui ne coûtent rien et rapportent des taxes et des impôts procèdent de l’interventionnisme et de l’atteinte à l’intégrité et à la souveraineté d’un pays.
Autrement dit, autant vous ne pouvez pas vivre, même si certains en rêvent, dans un air exempt de microbes, virus et bactéries, autant vous ne pouvez pas vivre dans un monde sans organismes évoluant en fonction des besoins de ses acteurs. Soit vous développez vos anticorps soit vous prenez des médicaments avec les effets secondaires qui vont avec.....