Le conseiller d’Etat Théophile Berlier prétendit
que l’ordre proposé ne convenait pas à une république,
que les croix et les rubans n’étaient que les hochets
de la monarchie. Il ajouta que, dans une république, les
magistratures et les emplois devaient être les premières,
les seules récompenses des services, des talents, des
vertus, et il ne manqua pas de citer l’exemple des Grecs et des
Romains.
Napoléon lui donna une leçon d’histoire,
et, répondant à ceux qui avaient cité les
peuples anciens, dit : « On nous parle toujours des Romains !
Il est assez singulier que, pour refuser les distinctions, on
cite l’exemple du peuple chez lequel elles étaient le
plus marquées. Est-ce là connaître l’histoire
? Les Romains avaient des patriciens, des chevaliers, des citoyens
et des esclaves, Ils avaient pour chaque chose des costumes divers,
des moeurs différentes, Ils décernaient en récompenses
toutes sortes de distinctions, des noms qui rappelaient des services,
des couronnes murales, le triomphe !... Je défie qu’on
me montre une république ancienne et moderne dans laquelle
il n’y ait pas eu de distinctions.On appelle cela « des hochets »
; Eh bien, c’est avec des hochets qu’on mène les hommes.
L’on convient qu’il nous faut des institutions ; Si l’on ne trouve
pas celle-là bonne, qu’on en propose donc d’autres ! Je
ne prétends pas qu’elle doive sauver la République
ou l’État, mais elle y jouera son rôle. »