à l’auteur,
Vous avez tout à fait raison de souligner le ridicule des
déclarations de l’actuel ministre des étrangères aussi bien que
celles de Juppé à l’époque de l’aventure Libyenne.
Je trouve tout de même que votre analyses pèche par des a priori
à peu près aussi consternants que ceux qu’on trouve à la base de
cette idéologie complètement pourrie qui fait prévaloir les
interventions humanitaires.
Vous tombez dans l’éternel conspirationnisme qui est la religion
d’AgoraVox. D’un côté le méchant Occident, et de l’autre, de
pauvres peuples dominés et persécutés, pacifistes et
bienveillants, incapables de recourir à des solutions violentes.
Bachar el Assad est au fond un brave homme, et son armée n’a jamais
fait de mal à personne. Je suppose que bientôt Sadam Hussein et
Khadafi - dont la fin atroce ne me fera certes jamais rigoler -
étaient des modèles de vertu. Quand je lis ces sortes de choses, en
revanche, je suis plié en quatre, et si un Bachar el Assad vous
lisait, quand on sait ce que sont les moyens traditionnels de
gouverner par la terreur dans cette région du monde, il serait sans
doute le premier à trouver immensément naïf votre manichéisme.
La politique française à l’égard du Moyen-Orient - je ne parle
pas de celle de l’Amérique !- est d’une prodigieuse imbécillité,
et c’est lui faire trop d’honneur que de lui prêter des calculs
florentins. Le pétrole ? Oui, je veux bien, mais le pétrole ne
durera pas éternellement - et à plus long terme ? On aura réussi à
assurer partout la prise de pouvoir d’un islam fanatique dont on
verra les conséquences jusqu’en Europe. On commence même à pouvoir
les observer ici, et ça n’est pas très beau à voir. Que la France
ait contribué à aggraver le sort des Libyens, des Tunisiens, demain
celui des Syriens peut-être, en soutenant des forces d’opposition
d’inspiration démocratique en apparence et islamofascistes de fait,
cela ne fait aucun doute. Est-ce le résultat d’un calcul intelligent
? Je ne le pense pas. Il me semble que c’est surtout la connerie, la
chose du monde la mieux partagée, qui étend partout désormais son
empire, et c’est encore bien plus grave et bien plus inquiétant que
le machiavélisme politique. Le monde est devenu trop complexe pour
les têtes étroites des politiciens incultes qui prétendent
orienter son avenir : la plupart, comme Juppé ou Fabius, perdent les
pédales.
Sur cette question de la Syrie, je conseille de lire une récente
conférence d’Alain Chouet, qui avait publié un bouquin fort
décapant, il y a un an, à une époque où les média, sous le charme
de l’illusion lyrique du printemps arabe, pédalaient encore dans la
semoule. C’est à cette page :
http://www.les-crises.fr/la-situation-en-syrie-chouet/