@ jluc :
Je ne sais pas s’il y a vraiment un sens caché. Parfois j’entrecroise des thèmes que je pense liés, ou que je lie, pour en tirer plusieurs conclusions. D’autres fois je pars d’un point pour arriver à un autre, mais il y a un lien. Disons que j’aime écrire de manière pas toujours linéaire. Cela me permet de mieux approcher la complexité des choses. Un événement est rarement là tout seul. Dans bien des cas la thèse et l’antithèse peuvent trouver une légitimation, même sans synthèse. Ici la liberté d’éducation est le fond de mon article, plus que la religion en elle-même. Je fais l’avocat du diable avec le titre, et je prolonge à l’excès la décision du juge allemand sur la circoncision. Car interdire la circoncision revient de fait à interdire l’entrée dans la religion - en tous cas chez les juifs.
Il y a des formes de maltraitances que je crois collectivement admises, comme la violence physique ou sexuelle. On est alors automatiquement hors de la limite de ce qui est pénalement accepté et moralement acceptable. Mais sur la circoncision, où et quelle est la limite ? Et sur le piercing ?
Il faudrait décider d’une limite et qu’elle soit acceptée par une grande majorité. On pourrait dire que tout ce qui touche à l’intégrité physique des enfants est hors limite et que par principe c’est inacceptable. Mais quand-même : jusqu’où doit être posée l’intégrité physique ? Et qui en décide ? Vacciner atteint à l’intégrité physique puisque l’on introduit dans le sang une maladie atténuée que l’enfant n’aura peut-être jamais. On argue de prévention et d’une bonne intention. N’empêche qu’il y a altération de l’intégrité physique, avec dans certains cas des risques de réactions pathologiques voire mortelles.
L’intégration de l’enfant dans une communauté contient des rites de passage : baptême, examens scolaires ou sportifs, qui passent soit par son corps soit par son mental. Ces rites supposent une certaine contrainte. Mais on n’y voit pas de maltraitance tant que c’est pour faire une place à l’enfant dans le monde ou pour l’intégrer dans une communauté. Dans le cas de la circoncision on est devant une mutilation (pas grave) décidée par les parents en accord avec une communauté, cela depuis des millénaires.
Or un juge décide que les parents ont faux. Qui a autorité pour décider et selon quel principe ? Quelle est la définition de la maltraitance invoquée part le juge ? Faut-il, dans le même ordre d’idée, interdire la fessée ? Faut-il exclure toute référence contraignante au corps dans l’éducation ? Jusqu’où va-t-on ? Doit fixer une fois pour toute par une loi ce qui doit être adapté aux circonstances et nuancé par le jugement intelligent des parents ? En poussant un peu plus loin : demander un effort physique en classe à un enfant qui ne veut pas sera-t-il un jour considéré comme une maltraitance ?
Et comment évaluer les maltraitances psychologiques ?
Question subsidiaire, mais qui sort un peu du sujet (quoique) : comment en arrive-t-on à ne plus avoir de cadre collectif sur les limites ? Comment en arrive-t-on à ce qu’un juge fasse loi pour des millions de personnes sur un sujet qui ne posait pas de problème avant ? Et comment juger cette évolution ?
Je crois qu’en effet cette interdiction de la circoncision pose plusieurs questions en cascade et de manière intriquée. Je n’ai d’ailleurs pas de position tranchée. Je questionne plus que je ne réponds.