Les études et les expériences menées aux Etats-Unis le confirment : la dépénalisation du cannabis contribue à soulager les finances publiques.
Matignon l’assure au lendemain des déclarations du ministre de l’EducationVincent Peillon : il n’y aura pas dépénalisation du cannabis. Dommage, diront peut-être certains économistes. Car sa dépénalisation aurait pu être utile d’un point de vue financier.
Cécile Duflot évoquait récemment les deux avantages théoriques, selon elle, de la dépénalisation. Tout d’abord, casser l’économie parallèle et faire baisser le trafic, ce qui permettrait à l’Etat de réduire les frais liés à la lutte contre les drogues dites douces. Selon l’économiste Pierre Kopp, la France dépense autour de 300 millions d’euros par an pour interpeller environ 80.000 personnes, sans que cela ait d’ailleurs un effet radical sur la consommation de cannabis.
Mais le deuxième avantage de la dépénalisation est encore plus intéressant pour les Etats. Si on considère désormais le cannabis comme l’alcool ou le tabac, ce que suggère Cécile Duflot, il peut alors être taxé, ce qui permet aux Etats d’engranger des recettes importantes.
Les Etats-Unis expérimentent déjà ce système. Près d’une vingtaine d’Etats y ont légalisé l’usage et la culture du cannabis pour raisons médicales. En théorie, la vente du cannabis n’est pas libre dans ces régions. Mais en pratique, c’est tout comme. Il n’est guère difficile d’y obtenir une ordonnance, comme par exemple en Californie, où le cannabis peut être prescrit contre l’insomnie ou l’anxiété.
De fait, les dispensaires - sorte de boutiques où on trouve le cannabis sous diverses formes, y compris parfois des glaces, des biscuits ou des boissons fraîches - se multiplient outre-Atlantique. Et les taxes que ces dispensaires génèrent augmentent aussi. Dans le Colorado, elles représentent déjà plusieurs millions de dollars par an. Et si la marijuana était entièrement légalisée au niveau fédéral, ce serait encore plus profitable pour le gouvernement américain, assurent les économistes. Selon les calculs de Jeffrey Miron, les Etats-Unis pourraient économiser 41 milliards de dollars de dépenses chaque année si la dépénalisation était prononcée partout.
Certes, ce genre de calcul est à prendre avec des pincettes. Il faut imaginer le prix du cannabis en situation de dépénalisation, faire des hypothèses sur les volume distribués et les niveaux de taxes pratiqués. Toujours selon Pierrre Kopp, le prix est la variable essentielle : s’il était trop élevé, cela susciterait du trafic (comme le démontre par exemple le trafic de cigarettes en France). S’il était trop bas, la consommation pourrait se développer à outrance. Toutefois, selon lui, la dépénalisation pourrait rapporter 1 milliard d’euros en France. En tablant sur un prix au gramme dix fois supérieur à celui du tabac, les experts de Bercy arrivent, de leur côté, à un trésor de guerre de 800 millions d’euros par an. Pas si mal, dans le contexte actuel où le moindre sou compte.