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Commentaire de Morpheus

sur Du nazisme à la démocratie, une histoire faite avec les cons, raContée dans un billet de con


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Morpheus Morpheus 24 octobre 2012 17:34

Ce serait juste bien, Bernard, de ne pas parler de >démocratie< lorsque tu parles de notre contexte politique actuel, qui est son stricte contraire : l’oligarchie.

Du coup, le papier aurait du (à mon avis) s’appeler « Du nazisme en oligarchie » ou « Du nazisme en fausse démocratie ».

Dans la théorie politique grecque, on distinguait trois formes de gouvernements, et cette distinction est toujours valable de nos jours : le gouvernement d’un seul (monarchie ou tyrannie) ; le gouvernement de quelques-uns (aristocratie ou oligarchie) et le gouvernement du grand nombre (démocratie ou ochlocratie).

Morgens H. Hansen explique, dans La Démocratie athénienne à l’époque de Démosthène : « Au début du livre VI de La Politique, Aristote énumère les éléments caractéristiques d’une constitution « démocratique ». Ils ont trait principalement aux magistrats : durée limitée de leur mandat, qui n’est pas renouvelable (1), leur rotation (2), les limites de leurs pouvoirs (3), leur tirage au sort (4). (...) En plus, tous les citoyens peuvent siéger comme jurés (5), prennent en assemblée populaire les décisions importantes (6) et doivent être défrayés de leur participation aux activités politiques. () C’est le peuple, sans distinction de naissance, de fortune ou d’éducation, qui détermine le caractère démocratique du régime. »

Qu’avons-nous de nos jours, au regard de ces critères :

(1) des mandats longs (5 à 6 ans), renouvelable (opposé aux mandats courts - un an - et non renouvelables de la démocratie athénienne).

(2) pas de rotation des charges, puisque le processus de désignation des magistrats (représentants) est le vote, et non le tirage au sort.

(3) le gouvernement de la Ve république n’a pratiquement aucune limite à son pouvoir ; le président est « maître en son palais » : il nomme le gouvernement, il peut dissoudre l’assemblée, il commande l’armée, il décide de la politique, il nomme le Garde des Sceaux, et il n’est pas révocable (même s’il trahit les français au dernier degré), il dispose d’une immunité judiciaire durant tout son mandat)

(4) le processus de désignation est l’élection, c’est-à-dire par définition, oligarchique (cf. Aristote Je veux dire qu’il est considéré comme démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort et comme oligarchique qu’elles soient électives) ; voter = choisir le meilleur, en grec ARISTOS.

(5) tous les citoyens peuvent siéger comme juré, mais le processus par tirage au sort est contrecarré, de nos jours, par d’autres mesures, permettant notamment aux avocats de récuser tel ou tel juré, comme l’on récuse un juge ; de plus, sur quels critères sont élaborées les listes de tirage au sort des jurés (j’en appelle à ceux qui savent, je n’ai pas cette information) ?

(6) les décisions importantes dépendent essentiellement du gouvernement (exécutif), qui en outre brûle largement la séparation des pouvoirs en mandatant (officieusement) les élus de l’assemblée appartenant à leur majorité de proposer tel ou tel projet de loi, et en les faisant ratifier, c’est-à-dire que l’exécutif s’abroge, par la bande, le pouvoir législatif.

Morgens H. Hansens précise : « Dans l’oligarchie, le pouvoir est exercé par les « possédants » - les euporoi, généralement minoritaires (a) - tandis que dans la démocratie, il l’est pas les « non-possédants », généralement majoritaires (b).

(a) le petit nombre
(b) le grand nombre

Il n’y a donc absolument aucun doute que notre régime n’est, en aucun point en rapport avec les critères qui définissent une démocratie (excepté peut-être le point (5) sus-mentionné, pour partie, et encore, c’est discutable), mais au contraire, pratiquement en tous point, correspondant à l’oligarchie, c’est-à-dire le mauvais avatar du gouvernement pas le petit nombre.

C’est précisément ce régime qui a besoin d’un peuple soumit, mais notre régime, depuis un peu plus de deux cent ans, a ceci de subtile qu’il se prétend (trompeusement) >démocratique<. Nos régimes sont une construction mensongère, une illusion tendue devant nos yeux pour nous empêcher de voir la réalité. C’est cette tromperie qui nécessite un peuple idiot, un peuple décérébré, un peuple de crétins, infantilisés, abêtit, rendu inconscient et désespérément dépendant du système qui l’exploite.

On ne peut donc pas parler de >démocratie< puisque cela fait partie de la tromperie de base de ce qui engendre la connerie du peuple. Il va sans dire qu’un régime réellement démocratique a besoin, au contraire, d’un peuple avisé, d’un peuple engagé et volontaire, d’un peuple informé, d’un peuple éduqué, d’un peuple capable de se rendre compétent dès lors qu’il est amené, à tour de rôle, à exercer un mandat dans l’une ou l’autre des magistratures du régime.

A part ce point crucial, merci pour le papier.

Cordialement,
Morpheus


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