D’un côté, on a des couples qui, ne pouvant avoir des enfants naturellement mais souhaitant perpétuer leurs gènes et de l’autre on a des femmes dans la gêne qui se résignent à louer leur utérus et, forcément tout ce qu’il y a autour par la même occasion.
Dans une interview à radio BFM ce samedi 25 avril, Sylviane Agacinski expliquait qu’il y avait une convergence entre la technique médicale et la marchandisation du corps et que sans éthique, on pouvait se dire que, puisque la médecine peut le faire, alors quel mal y aurait-il à faire porter son enfant par une femme désireuse de « rendre service ».
Il est vrai que les femmes ont une grande familiarité avec la location d’une partie de leur corps, le vagin en particulier. Ne dit-on pas que la prostitution est le plus vieux métier du monde ? Avec la procréation pour autrui, on monte d’un niveau dans l’appareil génital féminin en passant du vagin à l’utérus.
Louer son vagin n’est pas chose facile pour une femme car, autour d’un vagin, il y a un corps et une tête, un coeur et une âme. Dans la majorité des cas, les femmes louent leur vagin parce qu’elles sont dans la misère et que, souvent elles y sont forcées. Cette activité n’est pas sans risques : esclavage, maladies, menaces physiques et détresse psychologique jugulée tant bien que mal par l’usage de drogues. Ce ne sont pas quelques call-girls épanouies qui feront oublier la souffrance dans laquelle sont vissées la majorité des prostituées.
Louer son utérus est humiliant dans ce qu’il ramène la femme à sa fonction innée de reproductrice, de « bonne qu’à faire des gosses ». C’est éprouvant physiquement car, pour se préparer à acueuillir un embryon, il faut prendre des hormones qui peuvent avoir de désagréables effets secondaires.
Pendant une grossesse, la physiologie du corps se transforme : des hormones se libèrent, la quantité de sang habituelle s’accroît considérablement et provoque souvent des varices, les seins gonflent et deviennent douloureux, le ventre grossit et la peau se tend, les risques de fausse couche développent des angoisses, certaines femmes ont d’importantes nausées, on encourt des risques d’éclampsie et de phlébite et j’en passe. De plus, une femme qui porte l’enfant d’une autre doit se soumettre à des règles d’hygiène de vie très contraignantes.
Pendant la grossesse, la porteuse sent le foetus bouger, elle vit en symbiose avec lui, elle communique, elle s’attache, de même que l’embryon va s’attacher à elle. Ils vivent l’un avec l’autre dans la plus grande intimité qui soit et en permanence.
L’accouchement comporte des risques même si la mortalité périnatale est faible en France. Il n’y a pas de risque zéro. Et puis l’accouchement est rarement une partie de plaisir car si l’anesthésie péridurale permet à la parturiente de ne pas souffrir, elle a toutes les chances de subir une épisiotomie pour faciliter la sortie du bébé. Cette incision de la vulve nécessite des points de suture et peut parfois mettre du temps à se cicatriser avec des douleurs conséquentes. De plus, si la délivrance nécessite une césarienne, il faut prévoir des douleurs et des cicatrices.
Après une naissance, presque toutes les mères éprouvent le « baby blues » et se sentent vides. Comment en effet passer d’une présence constante à l’intérieur de soi à un vide. Prendre son bébé dans ses bras, sentir son odeur, sa chaleur, lui parler et le caliner permettent de dépasser le baby blues mais quand on se sépare immédiatement du bébé, comment fait-on pour combler le vide physique et moral ?
Au cours d’un documentaire sur les mères porteuses en Inde, pratique courante et non réglementée là-bas, une femme disait qu’elle croirait à l’inocuité de cette pratique le jour où des femmes riches porteraient les enfants des femmes pauvres. On ne peut pas croire en effet que des femmes puissent librement choisir de louer leur ventre sans contrainte. D’ailleurs on sait bien que, chez les pauvres, le corps se vend bien, sous toutes ses formes et même mort. On peut acheter des reins, des poumons et des ovocytes. Et tout cela grâce aux progrés de la médecine. Nous vivons une époque vraiment formidable !