Merci pour votre message, qui est intéressant et donne envie de débattre.
Pour moi, la complexité que cette question revêt pour vous tient au fait que nous mélangeons souvent deux choses : donner la parole à quelqu’un et approuver son point de vue. Or les deux choses sont bien différentes.
Vous connaissez la phrase de Voltaire : « Je déteste vos idées, mais je suis prêt à mourir pour votre droit de les exprimer ». La liberté d’expression pour les idées avec lesquelles on est d’accord, c’est facile. Et ça n’est pas la liberté d’expression, à l’évidence. La vraie liberté d’expression c’est celle que l’on reconnait à ses adversaires, aux idées que l’on aime pas, par définition !
C’est ce que Taddeï défend, tout en se soumettant aux lois françaises qui interdisent de tenir certains propos, à commencer par dire que les camps nazis n’ont pas existé. Taddeï ne dit pas ce qu’il pense de cette loi, il dit qu’il s’y soumet.
Je suis d’accord avec vous, l’Etat ne me semble pas plus légitime qu’un journaliste pour dicter ce qui est vrai ou faux, ce que l’on a le droit de dire ou non. La France n’est pas du tout un pays exemplaire sur ce point. Donc oui, pour moi il faudrait sans l’ombre d’un doute abolir toutes ces lois qui dictent l’Histoire. Et cela pour plusieurs raisons :
1/ La liberté d’expression est un droit qui doit être sacré, car il est un pivot de toutes nos libertés
2/ Il est plus efficace et plus sain de contredire une théorie, avec des arguments, que d’interdire son expression
3/ Cette interdiction renforce la sensation de victimisation, donne une aura, un crédit : si l’on me muselle c’est bien qu’il y a quelque chose à cacher. Et surtout, on sait bien que réprimer et refouler une expression, qu’elle soit individuelle ou collective, ne suffit pas à la faire disparaitre. Cela suffit à la cacher, et à la laisser proliférer dans l’ombre, dans l’inconscience (collective ou individuelle). Si l’on veut lutter contre des idées, le SEUL moyen est de le faire par la conscience, c’est à dire en apportant les ingrédients qui vont aider à comprendre. Ce n’est pas facile mais c’est la seule façon de faire. Sans oublier que derrière les pensées des uns et des autres se nichent leurs émotions, qui sont irrationnelles, et qui déterminent secrètement les pensées. Il ne faut pas non plus se masquer cela... On pourrait continuer ainsi de plonger vers la cause, et ce serait intéressant, mais un peu trop loin du sujet de départ peut-être...
En résumé, autoriser toutes les expression, mais informer et contre-informer honnêtement est à mon avis une sortie par le haut, une attitude digne. Cacher, interdire me semble une solution de facilité, aux effets immédiats cosmétiques mais contre-productive en réalité, une solution lâche ou manipulatrice tout simplement.
Je suis d’accord avec Noam Chomsky qui dit que la seule restriction à la liberté d’expression admise devrait être la situation (ou équivalent) où un individu tient une arme dans sa main, pointée vers une potentielle victime. Il est interdit de lui dire « tire ». A part cela...