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Commentaire de COLRE

sur La « novlangue » des psychopathes


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COLRE COLRE 16 mai 2013 22:25

Bonjour Morpheus,

Je suis d’accord avec votre notion d’ « engramme émotionnel » qui s’inscrit bien dans mon propre intérêt disciplinaire (les sciences cognitives) et les recherches pionnières de Changeux sur le renforcement des « cablages neuronaux ».

Certains de nos conditionnements éducatifs et socio-culturels sont puissants, au point de nous accompagner inchangés jusqu’à un âge avancé. Là, il n’y a pas grand chose à espérer. Les évolutions sont alors lentes, devant se faire à l’échelle de la génération. 

Mais d’autres sont moins profonds et sujets à modifications sous l’effet de prises de conscience, de nouvelles éducations ou influences, voire de nouveaux conditionnements. C’est là que le « dévoiement » des mots est à surveiller, au moment où ils peuvent basculer, et c’est là qu’il faut en contrer les effets « pervers ».

Ainsi, tous les mots que vous citez ne sont pas (encore) détournés (« politique, démocratie, élection… »). Il faut qu’ils passent par un mécanisme progressif de péjoration, qui commence en général par la déformation du mot (politicaille/politicard, démocrassouille, élection-piège-à-con, laïcard, faucialisme…) Certains mots comme « oligarchie » ou « libéralisme » ont déjà franchi le pas et sont in peto dans la mauvaise case, sans analyse du contexte.

Donc, il faut défendre les mots dont la perversion sémantique pervertit l’idée qu’ils désignent. Mais ce n’est pas si simple… les mots ont une histoire, évoluent selon les contextes sociaux et symboliques, et de façon parfois bénéfique ou intéressants. Heureusement que le concept de « suffrage universel » ne désigne plus seulement les hommes, ayant certains métiers et certains biens… Heureusement que la locution « fille-mère » a disparu, ou « Nègre », ou « cul-de-jatte »…

Ce qui m’importe, c’est de contrecarrer les évolutions que je juge nocives dans le cas d’un détournement pervers du mot, quand il s’agit d’une vraie manipulation. Ainsi « novlangue », qui m’a fait réagir car son emploi pour dénigrer le vocabulaire des politiques (ou journalistes) revient à faire passer en douce l’idée que notre société est totalitaire, que notre démocratie est totalitaire, que le suffrage est une escroquerie. Je me suis déjà battue contre les « intégrismes modérés » (!) ou la « laïcité positive », ou « radicale »… Car dans ces derniers cas, le détournement revient à vider de son sens les mots en leur accolant un épithète.

Votre exemple pour « ressource » est illustratif : c’est pourtant un beau mot. Quand la matière (naturelle) devient ressource, c’est toute la créativité de l’humain qui est évoquée. Impossible ce déni de soi-même, l’humain est faber

Donc, défendons nos mots, avec vigilance, car ce sont nos idées qu’ils faut défendre.


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