Soyons clairs. Depuis la chute du « mur », le capitalisme s’est trouvé sans doctrine opposée et sans nécessité de présenter un visage acceptable. Il s’est débridé (on dit aussi « décomplexé »), les libéraux pouvant enfin mener à bien les « réformes » qu’ils appelaient de leurs voeux. Pour simplifier sans caricaturer, il s’est agi simultanément de faire croire au gens que l’Etat était le problème et pas la solution, qu’ils vivraient mieux et plus « libres » dans des démarches individuelles (voire individualistes) plutôt que collectives, et que le « marché » allait tout résoudre en « s’autorégulant ». Nous sommes également passé d’un capitalisme productiviste à un capitalisme financier, avec les dérives que l’on sait, et en particulier la double privatisation des biens et services publics, des bénéfices, tout en, conservant la mutualisation des pertes.
Vingt ans plus tard, aucune personne sensée ne peut être dupe des « résultats » obtenus que je résume comme suit : c’est une « crise » qui dure mais ce n’en pourtant pas une. Pourquoi :
1. parce que nous ne sommes plus dans une démocratie mais dans une oligarchie, où le pouvoir et les moyens de décision ont été confisqués au peuple et donnés aux financiers, aux multinationales, aux spéculateurs et aux hommes et femmes politiques qui les soutiennent ;
2. parce qu’une crise, cela a un début et une fin. Pour le moment, il y a eu un début et il n’y a pas et il n’y aura pas (sauf si nous changeons de direction rapidement et fortement) d’issues. Ce n’est pas l’intérêt des oligarques qui nous gouvernent !
3. parce que l’appauvrissement généralisé, la précarité, et ce que j’appelle la société de la peur - dont les libéraux n’ont pas le monopole, il suffit pour s’en convaincre de regarder ce que disent et font les extrémistes écologistes qui dévoient ce que devrait être l’écologie - font que nos concitoyens sont complétement paralysés et qu’ils ne se bougeront qu’en tout dernier ressort, c’est à dire lorsque la pression de viendra insoutenable.
On assistera alors à une explosion sociale, dont personne ne peut dire où elle nous conduira. Mais compte tenu de la récupération constante et croissante des thèses les plus répugnantes de l’extrême droite par les partis en place, y compris jusqu’au PS, il est à craindre que nous nous retrouvions ramenés presque 80 ans en arrière, dans une situation encore plus grave, dans laquelle - ne nous inquiétons pas pour eux - les banques, les multinationales et les spéculateurs trouveront de toutes façons toujours leurs comptes.