@ Wesson
sous la Russie Tsariste, le pouvoir y était extraordinairement brutal,
et la population réduite en esclavage y était tout juste autorisé à y
crever la dalle dans un sous développement catastrophique.
Vous avez, hélàs, parfaitement raison. Connaissant vos opinions libérales, vous n’en avez que plus de mérites à faire preuve de bonne foi.
Par contre, concernant ceci -
Les famines y étaient endémiques et la mortalité y était très largement
supérieure à ce qu’elle fut dans les pires années du Goulag.
Cela mérite une petite mise au point. Quelle était-elle, d’après vous, cette fameuse « mortalité » des pires années du Goulag (sous Staline d’après vous, j’imagine ?). Vous serez sans doute surpris d’apprendre qu’en moyenne, cette mortalité dépassait rarement les 4-5 %. Il valait mieux pour le directeur ; le fait est qu’à partir de 7%, une commission d’enquête se pointait et le mec risquait fort d’y rester, au Goulag, mais en tant que détenu. Je me base notamment sur un ouvrage fort intéressant de l’universitaire italien Domenico Losurdo - Staline, histoire et critique d’une légende noire. Il nous apprend aussi qu’aux États-Unis, jusque dans le XXème siècle, la mortalité dans les prisons grimpait jusqu’à 40%, et ne descendait jamais en dessous de 30. Étrange, non ?
Cela se comprend fort bien lorsque l’on prend la peine de s’intéresser à ce qu’était le Goulag : une institution de réhabilitation par le travail. Des remises de peine étaient systématiquement et régulièrement accordées à ceux qui faisaient leur quota, les activités culturelles et éducatives y étaient extrêmement encouragées (présence avérée de bibliothèques et de théâtres, de cercles scientifiques ou culturels, etc), les détenus étaient soignés et correctement nourris, dans la mesure du possible. Le prisonnier du Goulag était non pas un détenu purgeant une peine, mais un citoyen susceptible d’être réhabilité, donc méritait un traitement adéquat. Ce qui n’était pas le cas dans les prisons anglo-saxonnes, où le détenu est un nègre quelconque dont le destin est de crever au travail pour son patron.
Par ailleurs, d’après les archives soviétiques déclassifiées dans les années 1990, il s’avère que le chiffre total des condamnés entre 1922 et 1953 (vous savez, les zeures lé plu çombres...) ne dépasse pas 4,5 millions. On est loin des délires de Soljenytsine (qui porte bien son nom - en russe, ça signifie Lementeux). Sur ces 4,5 millions, le nombre de condamnés à la peine capitale est à peu près de 750 mille. Sur un pays de 170 millions d’habitants, sur 30 ans, ça fait pas des masses. Ah ben oui, si c’est soviétique, ça doit être bidonné. Forcément.
Il y a un truc à savoir sur la Russie pour comprendre à peu près ce qu’il s’y passe : historiquement, la productivité (notamment alimentaire) y est très faible. La raison tient évidemment aux conditions climatiques extrêmement rigoureuses (la Russie est en moyenne le 2ème plus froid pays du monde - la première place revient à la Mongolie). Il s’en suit que quand les « élites » (j’ai envie de dire « parasites ») prélèvent trop sur le peuple, le peuple vit à la marge du seuil de survie. Et, au bout d’un moment, confronté au choix entre crever ou tuer les parasites, il choisit évidemment la deuxième alternative. C’est pour cela que les jacqueries russes sont, historiquement, extrêmement féroces : dans une telle situation, le peuple n’a plus rien à perdre et il est sévèrement remonté. La révolution de 1916-1917 et la guerre civile qui suivit a été une immense jacquerie, une boucherie innommable qui fut bien cherchée et bien méritée par la cour de Nicolas 2.
Un pouvoir politique, quel qu’il soit, pour se maintenir en Russie doit limiter sa propre consommation. C’est, entre autres, parce que Staline encadrait brutalement la consommation des nouvelles élites qu’il fut autant aimé du petit peuple, et l’est d’ailleurs toujours. C’est pour la même raison qu’il est autant détesté des racailles de tout poil.