Hier j’avais mis ça sous l’article de Bernard :
« Se reconstitue à toute allure quelque chose qui rappelle ,même si
c’est de façon burlesque ,le »plan vertical« de l’ancienne relation de
l’homme à Dieu .La disparition de ce »plan vertical« ,il y a deux cents
ans,au profit du »plan horizontal« (la relation des hommes entre
eux),avait permis l’éclosion de la politique et de l’esprit critique.Sa
reconstitution ,même si elle n’en signe peut-être pas la fin ,promet en
tout cas à la politique comme à la pensée des temps
difficiles.L’histoire était chaos ,tourmentes,erreurs accumulées à
démêler par l’entendement .Quand un nouvel âge de la transcendance se
met en place ,nul besoin de l’interpréter ,ce serait même une impiété
.Le sacré ne souffre pas l’interrogation.Tout ce qui semble le mettre en
péril est de l’ordre du Mal absolu ,et ce Mal absolu ne saurait être
approché par les instrument de la raison :on doit seulement mener contre
lui une guerre incessante. La guerre du bien .Comprendre,ou essayer de
comprendre,devient au mieux suspect .La nouvelle religion n’a nul besoin
de penseur .Il ne lui faut que des missionnaires .
Ce sont eux
,évidemment,qui occupent les principaux rôles dans ce terrible roman
vrai .Maîtres censeurs,maîtres encenseurs d’eux- mêmes et de leurs
complices en vertu frénétique,maîtres faiseurs et moralisateurs,maîtres
chasseurs,maîtres oppresseurs,maîtres dénonciateurs et
persécuteurs,maîtres surveilleurs ,ils sont partout ou il s’agit de
réclamer »sans relâche la censure au nom de la liberté,la mise à l’index
au nom de la tolérance ,l’exaltation ethnique au nom de
l’antiracisme« .
Philippe Muray .
Extrait de »La prosternation des clercs" ; Le Figaro ,2002 ..