Enfin, notre lettre aux députés européens :
NON A LA PROPOSITION 2013/0309 (COD) ET AU RAPPORT DE LA COMMISSION ITRE SUR L’INTERNET !
Mesdames, Messieurs, les Députés Européens,
Vous
n’ignorez pas que les Droits et Libertés Fondamentaux sont un acquis
historique très cher payé par les populations européennes. Dans
l’exercice de ces droits et libertés, l’internet joue un rôle essentiel
par la neutralité du réseau et la liberté d’expression, de
communication, d’information, de critique...
La neutralité du
net exige que tout flux sur internet soit traité de la même façon
indépendamment de son origine, destinataire, expéditeur, type de contenu
ou des moyens (équipement, protocoles...) utilisés pour la transmission
des paquets. Or cette neutralité est clairement menacée par la proposition
2013/0309 (COD) de règlement du Parlement Européen et du Conseil
« établissant des mesures relatives au marché unique européen des
communications électroniques et visant à faire de l’Europe un continent
connecté, et modifiant les directives 2002/20/CE, 2002/21/CE et
2002/22/CE ainsi que les règlements (CE) n° 1211/2009 et (UE) n°
531/2012 » et le rapport de la Commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie (ITRE) qui vous sera présenté demain.
En effet, il est envisagé d’autoriser les fournisseurs d’accès à passer
des contrats avec des producteurs de contenu et à créer au sein de
l’espace de l’internet des « services spécialisés » auxquels il leur
serait permis d’accorder une priorité en matière de flux. A terme, une
telle politique représenterait la fin du service public garant des
droits fondamentaux des citoyens qu’est l’internet libre. Cette
évolution aurait des conséquences néfastes pour l’image et la stabilité
des institutions européennes à un moment où la crise économique et
sociale qui frappe notre continent dégrade progressivement, aux yeux de
la population, la crédibilité du monde politique et de la stratégie
suivie au cours des trois dernières décennies.
La priorisation
des flux et la censure de l’internet risqueraient même d’être perçues
comme une « machine à faire taire » répondant à la montée du
mécontentement citoyen. Rien ne serait plus nuisible qu’une telle
coupure de société.
De surcroît, la créativité dans tous les
domaines et les projets novateurs seraient lourdement pénalisés au
détriment de lobbies et groupes établis porteurs à terme de la sclérose
en l’absence d’une réelle concurrence. Dans un contexte de perte de
poids de l’Europe au niveau planétaire, un tel blocage aurait des
conséquences d’une gravité extrême pour l’avenir des pays européens.
On agite parfois des épouvantails tels que la pornographie pour plaider
que la censure de l’internet serait « nécessaire » et que le recours à la
justice constituerait une procédure trop « lourde ». C’est ne pas
comprendre les effets destructeurs qu’aurait une politique de censure
discrétionnaire privée. Tout simplement, la justice et les autorités
publiques doivent pouvoir disposer des moyens matériels nécessaires pour
intervenir efficacement : nombre suffisant de magistrats et d’agents
publics compétents, budget de la justice, procédures adaptées...
Nous vous demandons donc de ne pas donner suite aux propositions
prévoyant notamment des « services spécialisés » dans l’espace normalement
destiné à l’internet libre et avec régulation discrétionnaire des flux
par les fournisseurs d’accès.
Nous vous prions de recevoir, Mesdames et Messieurs les Députés Européens, l’expression de notre profonde considération.
Le Collectif Indépendance des Chercheurs
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