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Commentaire de BA

sur Bouleversant ! Nadine Morano (UMP) a lancé sa campagne pour les élections européennes en allant se recueillir, l'air pénétré, sur la tombe de Robert Schuman


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BA 1er mai 2014 11:16

Peter Van Ham et le journaliste européiste Jean Quatremer avaient déjà annoncé la couleur en septembre 2008 :

 

Puisque les 28 peuples européens aiment de moins en moins l’Union Européenne, il faut maintenant trouver un ennemi commun pour obliger les 28 peuples européens à faire l’Europe.

 

C’est le seul moyen qui reste aux européistes pour forcer les 28 peuples européens à faire l’Europe : trouver un ennemi commun, et faire une propagande médiatique contre cet ennemi commun ... l’Europe par l’épée en quelque sorte.

 

Lisez cet article très inquiétant.

 

Cet article est révélateur de l’état d’esprit des européistes en septembre 2008 ... et en mai 2014 :

 

De « l’Europe par la paix » à « l’Europe par l’épée »

 

Jean QUATREMER 9 septembre 2008

 

Et si Vladimir Poutine avait rendu un service à la construction européenne en envahissant la Géorgie ? En envoyant son armée à l’extérieur de ses frontières pour la première fois depuis l’implosion de l’Union soviétique, en décembre 1991, la Russie a mis fin par la même occasion à l’indolence de ceux, nombreux, qui ont gobé le mythe du triomphe de la paix, de la démocratie et de l’économie de marché. Depuis la chute du mur de Berlin, les Européens se sont persuadés que les menaces ne les concernaient plus directement et que la guerre était l’affaire de quelques peuples attardés et bien sûr des Etats-Unis, gendarmes autoproclamés de la planète. Or, si la Géorgie ou encore l’Ukraine sont les marches de la Russie, ce sont aussi les nôtres depuis les élargissements successifs, et les intérêts de l’Union - voire son territoire - sont désormais directement exposés aux périls extérieurs. On peut se demander si un « ennemi » n’est pas la condition sine qua non, surtout pour une société européenne qui n’a même plus conscience du confort dans laquelle elle vit, pour qu’émergent une identité commune et un sentiment d’appartenance, deux éléments qui font aujourd’hui cruellement défaut à l’Union pour qu’elle se constitue en puissance mondiale crédible ?

 

Les Etats se sont tous créés contre « l’autre » : l’Europe, fondée sur la paix, peut-elle paradoxalement échapper à l’épreuve du feu ? Curieusement, les Européens ont refusé de voir avec une constance troublante les signaux alarmants qui se sont développés depuis 1991 - multiplications des conflits armés à travers le monde, y compris en Europe, croissance géométrique des dépenses militaires dans le monde (1), raréfaction des matières premières, changement climatique, émergence d’« Etats voyous » ou malformés, terrorisme. L’Europe, qui se pense comme une « puissance douce », une « puissance civile », ne serait là que pour exporter ses normes de droit et son art du compromis. Cette vision du monde « woodstockienne » a volé en éclats avec l’irruption des chars russes en Géorgie : « Le problème est que nous vivons dans notre Europe postmoderne où tout le monde est beau et gentil, constate le président estonien, Toomas Hendrik Ilves, et tout à coup, nous nous retrouvons avec une grande puissance du XIXe siècle. L’Europe n’est pas prête pour ça. » La possibilité d’une guerre entre donc dans le champ du réel européen comme le reconnaît Nicolas Sarkozy en proclamant que l’Europe « veut la paix », manière d’admettre qu’elle est belle et bien menacée.

 

Mikhaïl Gorbatchev, le dernier chef de l’URSS, a lui aussi mis en garde le monde, dans son texte adressé le 26 août à l’agence de presse russe Itar-Tass : « La situation provoquée par les événements dans le Caucase a déclenché des mécanismes politiques et militaires en Amérique, en Europe et en Russie. [.] Le danger d’une nouvelle scission est apparu et la menace d’un cataclysme mondial s’accroît. » Cette prise de conscience que l’Union a des ennemis - le mot est encore tabou - qui menacent ses intérêts ne peut que la contraindre à accélérer la mise en place d’une défense européenne, comme le souhaite la France, au moment où les Américains se sont largement désengagés du théâtre européen. Aujourd’hui, l’Union n’a ni les instruments théoriques ni les moyens militaires pour assurer sa propre défense et encore moins pour intervenir sur un théâtre extérieur autrement que pour faire du « maintien de la paix ». Elle est un tigre de papier et Moscou se fait un plaisir de le lui faire sentir.

 

Le choix qui se pose désormais à l’Union est brutal : la soumission ou l’affirmation de sa puissance militaire. Il ne s’agit évidemment pas de prôner la guerre contre la Russie. Mais aujourd’hui, la diplomatie de l’Union n’a qu’une arme, l’élargissement, ce qui est totalement insuffisant. Pour être crédible, il faut disposer de moyens de puissance et donc être armé. Or ce passage d’une Europe puissance civile à une Europe puissance militaire ne peut se faire que si les citoyens européens admettent qu’il y a un « eux » et un « nous », un territoire commun et des valeurs à défendre face au reste du monde, autant de préalables indispensables à l’émergence d’une identité européenne et donc d’une Europe politique. En clair, la guerre ou plutôt la possibilité d’une guerre est la condition pour que l’Union s’affirme selon les mêmes mécanismes qui ont permis aux Etats-nations de se construire. De « l’Europe par la paix » à « l’Europe par l’épée », en quelque sorte.

 

Peter Van Ham, professeur néerlandais de sciences politiques au Collège d’Europe, fait justement le constat que « les limites de la campagne classique d’intégration ont été atteintes », comme le montrent les référendums négatifs en France, aux Pays-Bas et en Irlande (2).

 

Les citoyens ne croient plus au mythe fondateur européen, celui d’une construction communautaire dépassant les antagonismes des Etats-nations pour établir la paix et une « sphère de prospérité ». Un « idéal idyllique » qui ne correspond pas à l’état du monde et qui « entrave la formation de l’identité européenne » : l’Union n’est pas perçue comme un territoire doté de frontières qu’il faut défendre. L’irruption de menaces immédiates change la donne. Un ensemble de 460 millions de personnes (7 % de la population mondiale) est mieux à même de résister à des superpuissances et de peser sur le cours du monde. Le réarmement de l’Europe est donc à la fois idéologique - passer d’une sphère de prospérité à une sphère d’influence -, mais aussi matériel. Peter Van Ham va plus loin : l’Union doit se montrer « méchante » et « collectionner les scalps » afin de se faire « respecter ».

 

La guerre jouerait donc le rôle cristallisateur d’identité : déjà au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, l’Union avait identifié une série « d’ennemis », dessinant un monde « barbare » menaçant l’espace de paix kantien européen. Elle a donc déjà esquissé une « raison de nation » à la poursuite de l’intégration européenne, une raison « plus martiale et énergique ». Vladimir Poutine, en réveillant les pulsions impériales de la Russie éternelle, va obliger les Européens à prendre plus rapidement leur destin en mains.

 

Notes :

 

(1) Contrairement à l’Europe où les dépenses militaires ont chuté au profit du financement de l’Etat social (les fameux « dividendes de la paix »).

 

(2) In Visions d’Europe, par Bronislaw Geremek et Robert Picht, éd. Odile Jacob, 2007.

 

QUATREMER Jean

 

http://www.liberation.fr/tribune/2008/09/09/de-l-europe-par-la-paix-a-l-europe-par-l-epee_79763


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