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Commentaire de Alain SOULOUMIAC

sur Retour à la croissance par la loi - Vérité


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Alain SOULOUMIAC Alain SOULOUMIAC 5 juillet 2014 09:44

Souveraineté, monde global et balivernes

Merci pour ce très beau morceau de droit constitutionnel. Permettez-moi d’y revenir pour mieux éclairer mon propos.

Les légistes qui ont créé la théorie de la souveraineté vivaient au XVIe siècle. A cette époque, la théorie visait essentiellement le monarque. A la fin du XVIIIe siècle, au moment où les révolutionnaires l’ont repris pour l’appliquer au peuple, les communications (si l’on excepte le télégraphe de Claude Chappe qui servit beaucoup Napoléon) n’avaient guère changé et gouverner un territoire vaste comme la France, avec de simples chevaux, était problématique. Si l’on excepte la Poste, la mer et quelques grands fleuves, il y avait fort peu de réglementations internationales.

Le monde d’aujourd’hui a changé. La majorité des réglementations sont devenues internationales. Si votre mobile, votre internet, votre carte bleue et le moteur sophistiqué de votre voiture fonctionnent dans tous les pays européens, c’est grâce à des conventions internationales qui posent les jalons nécessaires à l’édiction de standards détaillés et compatibles.

Si la France était demeurée souveraine, au sens où Jean Bodin l’entendait, et si elle édictait ses propres réglementations sans s’inquiéter des autres, elle serait littéralement coupée du monde. C’est parce que sa Constitution l’autorise à auto-limiter sa souveraineté par voie de traités internationaux qu’elle est parvenue à prendre la part qui est la sienne dans la construction du monde global d’aujourd’hui.

 Au moment où la Constitution du 4 octobre 1958 a été adoptée, le Traité de Rome était déjà signé. Le GATT, source de l’Organisation Mondiale du Commerce, existait depuis plus de 10 ans déjà. Chaque fois que l’adoption d’un nouveau traité ou d’une nouvelle directive a paru soulever des difficultés, le Conseil Constitutionnel a été saisi, selon les règles posées par cette même Constitution, pour savoir si on pouvait ratifier les nouvelles dispositions internationales ou s’il fallait modifier le texte fondateur de la Ve République.

 Il ne s’agit donc pas de balivernes.

 

L’article 16 est sans doute un article de souveraineté. Il permet au Président de la République, lorsque des circonstances dramatiques l’exigent, de mettre en parenthèse la légalité ordinaire (dont les traités internationaux) pour décréter par voie de « décision » les mesures qu’il juge bonnes, dans le nouveau cadre supra-légal qu’autorise la Constitution. Toutefois, il faut souhaiter que ces circonstances ne surviennent jamais. Aujourd’hui, la crise est grave mais nous ne sommes pas dans les circonstances visées par ledit article.

Quant à la transparence, je partage tout à fait votre opinion. Les lois ne sont pas bonnes parce qu’elles sont lois, disait Montesquieu. Elles doivent être lois parce qu’elles sont bonnes.

Pour qu’une loi soit bonne, il faut que le citoyen la comprenne, qu’il soit conscient de sa nécessité et qu’elle l’habite. De très mauvaises habitudes ont été prises. Beaucoup de lois ne sont pas bonnes. Certaines disent une chose et son contraire, à coup d’exceptions. Beaucoup sont écrites dans un jargon incompréhensible. Énormément nombreuses, mêmes bonnes, sont celles qui demeurent inappliquées.

Les négociations transatlantiques constituent l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire. Par manque de confiance dans le citoyen, on préfère les négociations dans les couloirs à la transparence sur les grandes raisons qui fondent le projet.

Ce n’est pas ainsi que l’Europe doit procéder. Rien d’étonnant dans ces conditions que le fossé entre l’UE et ses citoyens se creuse.

L’Union Européenne a récemment déclaré qu’elle voulait placer les citoyens en son centre. C’est bien ce qu’elle doit faire.



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