Vous envisagez la « démocratisation du monde » seulement à partir de la prise de contrôle des moyens de production par les producteurs eux-mêmes. Fort bien. J’espère que ça arrivera. Et vite.
Toutefois il me semble que trop souvent les travailleurs ne se savent pas quel pouvoir ils détiennent en tant que producteurs (je considère qu’un service est le plus souvent une production).
Il faut donc que les gens prennent conscience de leur condition de producteurs. Vous semblez, optimiste, penser que ça arrivera tout seul. Les conditions matérielles portent la bourgeoisie et le prolétariat vers un monde sans frontières, conformément à l’oracle du père Karl.
Pour autant les frontières perdurent. Il y a environ 4 fois plus d’Etats aujourd’hui qu’en 1914.
Vous ne pouvez faire fi des identités.
Dans le monde, la religion fait bouger des gens, l’ethnie et la tribu aussi. On voit avec le conflit en Thaïlande que le rapport ville-campagne polarise des sociétés.
La prise de contrôle de l’Etat par les peuples est une étape essentielle pour la démocratisation du monde. La démocratie, d’ailleurs, si elle existe déjà, n’existe que dans des territoires réduits. Une démocratie mondiale n’adviendra pas uniquement par l’économie. Nous devons devenir aussi citoyens. Déconstruire les mythes philosophiques et historiques qui nous ont attaché à la République faussement démocratique.
Nous devons apprendre à discuter, et à faire émerger une expertise citoyenne plutôt qu’à remettre notre destin dans les mains d’ « experts » corrompus et d’aristocrates élus. Bref, l’analyse matérialiste est nécessaire, mais la sphère des mythes, des représentations doit être appréhendée pour combattre les fléaux du capitalisme et de la démocrature.
Je vous conseille de doubler votre socialisme conseilliste d’une analyse institutionnelle (voir Chouard, Rosanvallon, Blondiaux etc...).
Je pense qu’il ne faut pas en revanche parler de « démocratie mondiale » mais d’un monde de démocraties, car la démocratie, une et universelle, est une idée qui peut effrayer. En revanche un monde de démocraties n’a rien de totalitaire au sens où il est souhaitable que partout ce soit les peuples (dèmos) qui aient leurs propres destins en main. Reste à éviter le piège de la confusion entre peuple et majorité.