cette stratégie, telle que vous la présentez, n’a-t-elle pas de point faible ?
PCR : si ; qu’à un moment donné, les gens prennent conscience de la réalité et la regardent en face, et c’est cela que Poutine attend. Que va-t-il se passer en Allemagne et en France ? Les Allemands et les Français vont-ils comprendre, vont-ils se dire « mais les Américains nous mènent tout droit au chaos ! Qu’avons-nous donc à gagner de leur hégémonie mondiale ? Qu’avons-nous à gagner d’un conflit avec la Russie ou avec la Chine ? Arrêtons tout ! Faisons marche arrière ».
Si un pays quelconque devait se retirer de l’OTAN ou de l’UE, alors le mutisme de la « coalition des volontaires » sur les crimes de guerre de Washington se lézarderait. Concrètement, Washington a déclaré au Congrès qu’à partir du moment où la Maison blanche a le soutien de l’OTAN, le président n’a plus besoin du feu vert du Congrès pour partir en guerre. La vieille citation « le pouvoir absolu corrompt absolument » est attribuée à Lord Acton. Sans grand risque de se tromper, on peut en conclure que Washington a été corrompu par le pouvoir.
L’un des effets pervers de l’usage brutal de la force par Washington serait que les pays de l’OTAN réalisent qu’ils sont menés vers un conflit par un gouvernement devenu fou, qui prend des risques invraisemblables avec la vie humaine et même avec la planète.
Ainsi, il se pourrait bien que Poutine parie sur une prise de conscience du danger que représente Washington pour les vivants. Il espère que plus la Russie se montrera pondérée, moins elle adoptera une attitude provocatrice, plus grandes seront les chances que les gouvernements allemand et français réalisent que l’agenda de Washington est funeste pour le genre humain ; plus grandes seront les chances que l’Europe prenne des décisions pour s’affranchir, elle, ses pays et ses peuples, du contrôle de Washington. Dans ce cas, l’empire s’effondrerait.
Je suis convaincu c’est là que se situe le pari de Poutine. Il n’est pas fou, loin de là, il prend la mesure de la menace d’une guerre, il en a conscience. Et c’est très certainement la raison pour laquelle il a demandé à la Douma d’abroger le droit au déploiement de forces russes en Ukraine. Il tente de dire aux Allemands et aux Français – Vous voyez bien, ce n’est pas moi, ce n’est pas nous.
J’espère qu’il réussira. Car en fin de compte, l’avenir du monde est suspendu à la question suivante : l’usage de la diplomatie par Poutine prévaudra-t-il sur celui de la force par Washington ?
Il faut en conclure que le dernier espoir de préserver la planète, c’est Poutine.
Aidons-le.