Ce qui m’avait poussé à réagir n’était pas spécialement l’épicurisme de Montagne (bien que je me sois senti obligé d’apporter une nuance) ou le stoïcisme de Rabelais , mais son classement dans la catégorie des humanistes, quand on sait ce que désigne ce terme aujourd’hui. Le seul argument que tu m’aies donné concerne l’attitude virulente de Rabelais à l’égard de certains clercs, ce qui selon toi en fait un anti-traditionaliste caractérisé. Si cet élément était valable, alors on pourrait taxer d’anti-traditionalisme tous les prophètes de la Bible, y compris Jésus ! Même plus proche de nous, Léon Bloy traditionaliste invétéré, ne se privait pas d’invectiviter violemment le clergé de son époque. Ton argument est donc mauvais. L’arnaque consiste à faire de l’humanisme dans son ensemble un anti-christianisme. Pourtant, Erasme et Petrarque étaient de fervents chrétiens. Il y a donc des conceptions à revoir dansta lecture de l’histoire, ce qui était notre sujet de discussion initial.
Mais en ce qui concerne la morale, je trouve un peu facile de rejeter Bergson d’un seul geste sous prétexte que ce serait une « diversion ». Excuse-moi d’évoquer un auteur majeur de la réflexion éthique quand c’est le sujet ! L’auteur du tableau à beau ne pas être Kant (je l’avais remarqué, merci)il n’en reste pas moins que le monde de la pensée, auquel appartient la psychologie autant que la philosophie, est un monde de filiations. Il n’y a pas d’idées qui naissent toutes seules, mais des influences diverses qui se mélangent, et quand on étudie un peu la philo, au bout de quelques temps on parvient à identifier de quels présupposés part un penseur. Cela s’appelle la critique, et ce que je peux affirmer c’est que ce monsieur part de postulats néo-kantiens. Et moi j’ai le droit de partir d’avoir un autre point de vue qui me permette de définir des comportements éthiques qui ne sont pas dans ce tableau. Ce qui te dérange, au fond, c’est qu’on pense autrement que toi.
Je répondrai sur Rabelais plus précisément plus tard.